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Architecture rurale, second cahier, 1791/Du mélange des terres pour le pisé

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Du mélange des terres pour le pisé.

Ce mélange eſt facile & ſe conçoit aiſément.

Les terres graſſes doivent être corrigées par celles qui ſont maigres ; cela eſt d’ailleurs néceſſaire pour prévenir les fentes & crevaſſes qui, ſans ce mélange, ſe manifeſteroient ou arriveroient.

D’où il réſulte que

Les terres à briques, à tuiles, à four & à poterie, les terres graſſes, fortes, glaiſes, franches, végétales & marneuſes, ainſi que toutes les argilles,

Doivent être mêlées avec

Les terres maigres, légères, poreuſes, friables, ſavonneuſes, leſſivées, crayonneuſes, tuffières, ſablonneuſes, même tourbeuſes[1], & on peut y ajouter de petits graviers ou petits cailloux, des démolitions de mortiers ou des plâtras, ainſi que toutes ſortes de décombres du règne minéral, mais jamais des règnes végétal & animal[2].

Plus les terres ſont graſſes, glaiſeuſes, marneuſes ou argilleuſes, plus il faut leur ajouter de matières sèches, arides ou friables.

Il eſt impoſſible d’en déſigner ici la quantité : c’eſt une ſcience que la pratique enſeignera à tout le monde ; à cet effet, je vais mettre mes lecteurs à portée d’opérer eux-mêmes & de ſe livrer à pluſieurs petits eſſais qu’ils pourront faire, ou faire faire ſous leurs yeux. Je ne terminerai cependant pas cet article ſans faire remarquer une choſe bien eſſentielle ; le mélange des terres, étant d’une néceſſité abſolue, aſſure tout-à-la-fois de l’économie & de la bonté aux conſtructions des bâtimens de piſé ; c’eſt ce dont on va être convaincu.

  1. Pourquoi ne ſe ſerviroit-on pas des terres tourbeuſes pour bâtir des murs lorſqu’on en manque d’autres ? Cette nature de terre ſe prête, comme l’on ſait, à former des corps ou petites maſſes que l’on moule & dont les mottes ſervent de combuſtibles ; pour ajouter à leur denſité médiocre & ſortir leur grande inflammabilité, on doit faire le mélange ci-deſſus indiqué.
  2. Le piſé ne ſouffre point, comme le torchis, aucun des végétaux, ni animaux ; dans celui-ci on met, pour faire criſper la terre pétrie contre les pans de bois & leurs lattes, de la paille ou du foin hachés, du poil, de la bourre ou de la laine ; au contraire les ouvriers piſeurs ont la plus grande attention dans