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Bible Segond 1899/Cantique des Cantiques

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Collectif
Traduction par Louis Segond.
Delessert (p. 821-829).

LE CANTIQUE DES CANTIQUES


Chap. I.Cantique des cantiques, de Salomon.

2Qu’il me baise des baisers de sa bouche !
Car ton amour vaut mieux que le vin,
3Tes parfums ont une odeur suave ;
Ton nom est un parfum qui se répand ;
C’est pourquoi les jeunes filles t’aiment.
4Entraîne-moi après toi ! nous courrons !
Le roi m’introduit dans ses appartements.
Nous nous égaierons, nous nous réjouirons à cause de toi ;
Nous célébrerons ton amour plus que le vin.
C’est avec raison que l’on t’aime.
5Je suis noire, mais je suis belle, filles de Jérusalem,
Comme les tentes de Kédar, comme les pavillons de Salomon.
6Ne prenez pas garde à mon teint noir :
C’est le soleil qui m’a brûlée.
Les fils de ma mère se sont irrités contre moi,
Ils m’ont faite gardienne des vignes.
Ma vigne, à moi, je ne l’ai pas gardée.
7Dis-moi, ô toi que mon cœur aime,
Où tu fais paître tes brebis,
Où tu les fais reposer à midi ;
Car pourquoi serais-je comme une égarée
Près des troupeaux de tes compagnons ? —
8Si tu ne le sais pas, ô la plus belle des femmes,
Sors sur les traces des brebis,
Et fais paître tes chevreaux
Près des demeures des bergers. —

9À ma jument qu’on attelle aux chars de Pharaon
Je te compare, ô mon amie.
10Tes joues sont belles au milieu des colliers,
Ton cou est beau au milieu des rangées de perles.
11Nous te ferons des colliers d’or,
Avec des points d’argent. —
12Tandis que le roi est dans son entourage,
Mon nard exhale son parfum.
13Mon bien-aimé est pour moi un bouquet de myrrhe,
Qui repose entre mes seins.
14Mon bien-aimé est pour moi une grappe de troëne
Des vignes d’En-Guédi. —

15Que tu es belle, mon amie, que tu es belle !
Tes yeux sont des colombes. —
16Que tu es beau, mon bien-aimé, que tu es aimable !
Notre lit, c’est la verdure. —
17Les solives de nos maisons sont des cèdres,
Nos lambris sont des cyprès.
Chap. II.Je suis un narcisse de Saron,
Un lis des vallées. —
2Comme un lis au milieu des épines,
Telle est mon amie parmi les jeunes filles. —
3Comme un pommier au milieu des arbres de la forêt,
Tel est mon bien-aimé parmi les jeunes hommes.
J’ai désiré m’asseoir à son ombre,
Et son fruit est doux à mon palais.
4Il m’a fait entrer dans la maison du vin ;
Et la bannière qu’il déploie sur moi, c’est l’amour.
5Soutenez-moi avec des gâteaux de raisins,
Fortifiez-moi avec des pommes ;
Car je suis malade d’amour.
6Que sa main gauche soit sous ma tête,
Et que sa droite m’embrasse ! —
7Je vous en conjure, filles de Jérusalem,
Par les gazelles et les biches des champs,
Ne réveillez pas, ne réveillez pas l’amour,
Avant qu’elle le veuille. —

8C’est la voix de mon bien-aimé !
Le voici, il vient,
Sautant sur les montagnes,
Bondissant sur les collines.
9Mon bien-aimé est semblable à la gazelle
Ou au faon des biches.
Le voici, il est derrière notre mur,
Il regarde par la fenêtre,
Il regarde par le treillis.
10Mon bien-aimé parle et me dit :
Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens !
11Car voici, l’hiver est passé ;
La pluie a cessé, elle s’en est allée.
12Les fleurs paraissent sur la terre,
Le temps de chanter est arrivé,
Et la voix de la tourterelle se fait entendre dans nos campagnes.
13Le figuier embaume ses fruits,
Et les vignes en fleur exhalent leur parfum.
Lève-toi, mon amie, ma belle, et viens !
14Ma colombe, qui te tiens dans les fentes du rocher,
Qui te caches dans les parois escarpées,
Fais-moi voir ta figure,

Fais-moi entendre ta voix ;
Car ta voix est douce, et ta figure est agréable.
15Prenez-nous les renards,
Les petits renards qui ravagent les vignes ;
Car nos vignes sont en fleur.
16Mon bien-aimé est à moi, et je suis à lui ;
Il fait paître son troupeau parmi les lis.
17Avant que le jour se rafraîchisse,
Et que les ombres fuient,
Reviens !… sois semblable, mon bien-aimé,
À la gazelle ou au faon des biches,
Sur les montagnes qui nous séparent.
Chap. III.Sur ma couche, pendant les nuits,
J’ai cherché celui que mon cœur aime ;
Je l’ai cherché, et je ne l’ai point trouvé…
2Je me lèverai, et je ferai le tour de la ville,
Dans les rues et sur les places ;
Je chercherai celui que mon cœur aime…
Je l’ai cherché, et je ne l’ai point trouvé.
3Les gardes qui font la ronde dans la ville m’ont rencontrée :
Avez-vous vu celui que mon cœur aime ?
4À peine les avais-je passés,
Que j’ai trouvé celui que mon cœur aime ;
Je l’ai saisi, et je ne l’ai point lâché
Jusqu’à ce que je l’aie amené dans la maison de ma mère,
Dans la chambre de celle qui m’a conçue. —
Je vous en conjure, filles de Jérusalem,
Par les gazelles et les biches des champs,
Ne réveillez pas, ne réveillez pas l’amour,
Avant qu’elle le veuille. —

6Qui est celle qui monte du désert,
Comme des colonnes de fumée,
Au milieu des vapeurs de myrrhe et d’encens
Et de tous les aromates des marchands ? —
7Voici la litière de Salomon,
Et autour d’elle soixante vaillants hommes,
Des plus vaillants d’Israël.
8Tous sont armés de l’épée,
Sont exercés au combat ;
Chacun porte l’épée sur sa hanche,
En vue des alarmes nocturnes.
9Le roi Salomon s’est fait une litière
De bois du Liban.
10Il en a fait les colonnes d’argent,
Le dossier d’or,
Le siège de pourpre ;
Au milieu est une broderie, œuvre d’amour

Des filles de Jérusalem.
11Sortez, filles de Sion, regardez
Le roi Salomon,
Avec la couronne dont sa mère l’a couronné
Le jour de ses fiançailles,
Le jour de la joie de son cœur. —
Chap. IV.Que tu es belle, mon amie, que tu es belle !
Tes yeux sont des colombes,
Derrière ton voile.
Tes cheveux sont comme un troupeau de chèvres,
Suspendues aux flancs de la montagne de Galaad.
2Tes dents sont comme un troupeau de brebis tondues,
Qui remontent de l’abreuvoir ;
Toutes portent des jumeaux,
Aucune d’elles n’est stérile.
3Tes lèvres sont comme un fil cramoisi,
Et ta bouche est charmante ;
Ta joue est comme une moitié de grenade,
Derrière ton voile.
4Ton cou est comme la tour de David,
Bâtie pour être un arsenal ;
Mille boucliers y sont suspendus,
Tous les boucliers des héros.
5Tes deux seins sont comme deux faons,
Comme les jumeaux d’une gazelle,
Qui paissent au milieu des lis.
6Avant que le jour se rafraîchisse,
Et que les ombres fuient,
J’irai à la montagne de la myrrhe
Et à la colline de l’encens.
7Tu es toute belle, mon amie,
Et il n’y a point en toi de défaut.
8Viens avec moi du Liban, ma fiancée,
Viens avec moi du Liban !
Regarde du sommet de l’Amana,
Du sommet du Senir et de l’Hermon,
Des tanières des lions,
Des montagnes des léopards.
9Tu me ravis le cœur, ma sœur, ma fiancée,
Tu me ravis le cœur par l’un de tes regards,
Par l’un des colliers de ton cou.
10Que de charmes dans ton amour, ma sœur, ma fiancée !
Comme ton amour vaut mieux que le vin,
Et combien tes parfums sont plus suaves que tous les aromates !
11Tes lèvres distillent le miel, ma fiancée ;
Il y a sous ta langue du miel et du lait,
Et l’odeur de tes vêtements est comme l’odeur du Liban.
12Tu es un jardin fermé, ma sœur, ma fiancée,

Une source fermée, une fontaine scellée.
13Tes jets forment un jardin, où sont des grenadiers,
Avec les fruits les plus excellents,
Les troënes avec le nard ;
14Le nard et le safran, le roseau aromatique et le cinnamome,
Avec tous les arbres qui donnent l’encens ;
La myrrhe et l’aloès,
Avec tous les principaux aromates ;
15Une fontaine des jardins,
Une source d’eaux vives,
Des ruisseaux du Liban.
16Lève-toi, aquilon ! viens, autan !
Soufflez sur mon jardin, et que les parfums s’en exhalent ! —
Que mon bien-aimé entre dans son jardin,
Et qu’il mange de ses fruits excellents ! —
Chap. V.J’entre dans mon jardin, ma sœur, ma fiancée ;
Je cueille ma myrrhe avec mes aromates,
Je mange mon rayon de miel avec mon miel,
Je bois mon vin avec mon lait… —
Mangez, amis, buvez, enivrez-vous d’amour ! —

2J’étais endormie, mais mon cœur veillait…
C’est la voix de mon bien-aimé, qui frappe : —
Ouvre-moi, ma sœur, mon amie,
Ma colombe, ma parfaite !
Car ma tête est couverte de rosée,
Mes boucles sont pleines des gouttes de la nuit. —
3J’ai ôté ma tunique ; comment la remettrais-je ?
J’ai lavé mes pieds ; comment les salirais-je ?
4Mon bien-aimé a passé la main par la fenêtre,
Et mes entrailles se sont émues pour lui.
5Je me suis levée pour ouvrir à mon bien-aimé ;
Et de mes mains a dégoutté la myrrhe,
De mes doigts, la myrrhe répandue
Sur la poignée du verrou.
6J’ai ouvert à mon bien-aimé ;
Mais mon bien-aimé s’en était allé, il avait disparu.
J’étais hors de moi, quand il me parlait.
Je l’ai cherché, et je ne l’ai point trouvé ;
Je l’ai appelé, et il ne m’a point répondu.
7Les gardes qui font la ronde dans la ville m’ont rencontrée ;
Ils m’ont frappée, ils m’ont blessée ;
Ils m’ont enlevé mon voile, les gardes des murs.
8Je vous en conjure, filles de Jérusalem,
Si vous trouvez mon bien-aimé,
Que lui direz-vous ?…
Que je suis malade d’amour. —
9Qu’a ton bien-aimé de plus qu’un autre,

Ô la plus belle des femmes ?
Qu’a ton bien-aimé de plus qu’un autre,
Pour que tu nous conjures ainsi ? —
10Mon bien-aimé est blanc et vermeil ;
Il se distingue entre dix mille.
11Sa tête est de l’or pur ;
Ses boucles sont flottantes,
Noires comme le corbeau.
12Ses yeux sont comme des colombes au bord des ruisseaux,
Se baignant dans le lait,
Reposant au sein de l’abondance.
13Ses joues sont comme un parterre d’aromates,
Une couche de plantes odorantes ;
Ses lèvres sont des lis,
D’où découle la myrrhe.
14Ses mains sont des anneaux d’or,
Garnis de chrysolithes ;
Son corps est de l’ivoire poli,
Couvert de saphirs ;
15Ses jambes sont des colonnes de marbre blanc,
Posées sur des bases d’or pur.
Son aspect est comme le Liban,
Distingué comme les cèdres.
16Son palais n’est que douceur,
Et toute sa personne est pleine de charme.
Tel est mon bien-aimé, tel est mon ami,
Filles de Jérusalem ! —
Chap. VI.Où est allé ton bien-aimé,
Ô la plus belle des femmes ?
De quel côté ton bien-aimé s’est-il dirigé ?
Nous le chercherons avec toi. —
2Mon bien-aimé est descendu à son jardin,
Au parterre d’aromates,
Pour faire paître son troupeau dans les jardins,
Et pour cueillir des lis.
3Je suis à mon bien-aimé, et mon bien-aimé est à moi ;
Il fait paître son troupeau parmi les lis. —

4Tu es belle, mon amie, comme Thirtsa[1],
Agréable comme Jérusalem,
Mais terrible comme des troupes sous leurs bannières.
5Détourne de moi tes yeux, car ils me troublent.
Tes cheveux sont comme un troupeau de chèvres,
Suspendues aux flancs de Galaad.
6Tes dents sont comme un troupeau de brebis,
Qui remontent de l’abreuvoir ;
Toutes portent des jumeaux,

Aucune d’elles n’est stérile.
7Ta joue est comme une moitié de grenade,
Derrière ton voile…
8Il y a soixante reines, quatre-vingts concubines,
Et des jeunes filles sans nombre.
9Une seule est ma colombe, ma parfaite ;
Elle est l’unique de sa mère,
La préférée de celle qui lui donna le jour.
Les jeunes filles la voient, et la disent heureuse ;
Les reines et les concubines aussi, et elles la louent. —
10Qui est celle qui apparaît comme l’aurore,
Belle comme la lune, pure comme le soleil,
Mais terrible comme des troupes sous leurs bannières ? —
11Je suis descendue au jardin des noyers,
Pour voir la verdure de la vallée,
Pour voir si la vigne pousse,
Si les grenadiers fleurissent.
12Je ne sais, mais mon désir m’a rendue semblable
Aux chars de mon noble peuple.
Chap. VII.Reviens, reviens, Sulamithe !
Reviens, reviens, afin que nous te regardions. —
Qu’avez-vous à regarder la Sulamithe
Comme une danse de deux chœurs ? —
2Que tes pieds sont beaux dans ta chaussure, fille de prince !
Les contours de ta hanche sont comme des colliers,
Œuvre des mains d’un artiste.
3Ton sein est une coupe arrondie,
Où le vin parfumé ne manque pas ;
Ton corps est un tas de froment,
Entouré de lis.
4Tes deux seins sont comme deux faons,
Comme les jumeaux d’une gazelle.
5Ton cou est comme une tour d’ivoire ;
Tes yeux sont comme les étangs de Hesbon,
Près de la porte de Bath-Rabbim ;
Ton nez est comme la tour du Liban,
Qui regarde du côté de Damas.
6Ta tête est élevée comme le Carmel,
Et les cheveux de ta tête sont comme la pourpre ;
Un roi est enchaîné par des boucles !…
7Que tu es belle, que tu es agréable,
Ô mon amour, au milieu des délices !
8Ta taille ressemble au palmier,
Et tes seins à des grappes.
9Je me dis : Je monterai sur le palmier,
J’en saisirai les rameaux !
Que tes seins soient comme les grappes de la vigne,
Le parfum de ton souffle comme celui des pommes,

10Et ta bouche comme un vin excellent,… —
Qui coule aisément pour mon bien-aimé,
Et glisse sur les lèvres de ceux qui s’endorment !
11Je suis à mon bien-aimé,
Et ses désirs se portent vers moi.
12Viens, mon bien-aimé, sortons dans les champs,
Demeurons dans les villages !
13Dès le matin nous irons aux vignes,
Nous verrons si la vigne pousse, si la fleur s’ouvre,
Si les grenadiers fleurissent.
Là je te donnerai mon amour.
14Les mandragores répandent leur parfum,
Et nous avons à nos portes tous les meilleurs fruits,
Nouveaux et anciens :
Mon bien-aimé, je les ai gardés pour toi.
Chap. VIII.Oh ! que n’es-tu mon frère,
Allaité des mamelles de ma mère !
Je te rencontrerais dehors, je t’embrasserais,
Et l’on ne me mépriserait pas.
2Je veux te conduire, t’amener à la maison de ma mère ;
Tu me donneras tes instructions,
Et je te ferai boire du vin parfumé,
Du moût de mes grenades.
3Que sa main gauche soit sous ma tête,
Et que sa droite m’embrasse ! —
4Je vous en conjure, filles de Jérusalem,
Ne réveillez pas, ne réveillez pas l’amour,
Avant qu’elle le veuille. —

5Qui est celle qui monte du désert,
Appuyée sur son bien-aimé ? —
Je t’ai réveillée sous le pommier ;
Là ta mère t’a enfantée,
C’est là qu’elle t’a enfantée, qu’elle t’a donné le jour. —
6Mets-moi comme un sceau sur ton cœur,
Comme un sceau sur ton bras ;
Car l’amour est fort comme la mort,
La jalousie est inflexible comme le séjour des morts ;
Ses ardeurs sont des ardeurs de feu,
Une flamme de l’Éternel.
7Les grandes eaux ne peuvent éteindre l’amour,
Et les fleuves ne le submergeraient pas ;
Quand un homme offrirait tous les biens de sa maison contre l’amour,
Il ne s’attirerait que le mépris. —

8Nous avons une petite sœur,
Qui n’a point encore de mamelles ;
Que ferons-nous de notre sœur,

Le jour où on la recherchera ?
9Si elle est un mur,
Nous bâtirons sur elle des créneaux d’argent ;
Si elle est une porte,
Nous la fermerons avec une planche de cèdre. —
10Je suis un mur,
Et mes seins sont comme des tours ;
J’ai été à ses yeux comme celle qui trouve la paix.
11Salomon avait une vigne à Baal-Hamon ;
Il remit la vigne à des gardiens ;
Chacun apportait pour son fruit mille sicles d’argent.
12Ma vigne, qui est à moi, je la garde.
À toi, Salomon, les mille sicles,
Et deux cents à ceux qui gardent le fruit ! —

13Habitante des jardins !
Des amis prêtent l’oreille à ta voix.
Daigne me la faire entendre ! —
14Fuis, mon bien-aimé !
Sois semblable à la gazelle ou au faon des biches,
Sur les montagnes des aromates !


  1. Thirtsa, capitale du royaume d’Israël, avant que ce fût Samarie.