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De la Présence et de l’Action du Saint-Esprit dans l’Église/Chapitre 8

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CHAPITRE VIII.

DU CHAPITRE VIIIe DE M. WOLFF, CONCERNANT L’IMPOSITION DES MAINS.

M. Wolff avance dans ce chapitre qu’il y avait dans l’Église apostolique deux impositions des mains : l’une miraculeuse, qui communiquait des dons extraordinaires ; l’autre ordinaire et sans miracle, qui était conférée par tous les ministres.

Je suis aussi d’accord avec l’idée générale de ce chapitre, savoir, qu’il y avait une imposition des mains des apôtres qui leur était propre et qui, en général, distinguait l’apôtre. J’ai écrit et même agi, il y a déjà long-temps, en faisant cette distinction.

Mais il y a, dans ce chapitre de M. Wolff, des idées qui demandent une discussion, non seulement à cause de leur importance, mais aussi parce que ces idées roulent sur des sujets à l’égard desquels M. Wolff, tout en ayant saisi certaines vues que les frères auxquels il s’oppose possèdent depuis longtemps, est néanmoins tombé dans la confusion d’où ces vérités auraient dû le faire sortir. Il est consolant, toutefois, d’avoir au moins un terrain où il y ait quelque lumière dans l’intelligence et sur laquelle des raisonnements scripturaires puissent avoir prise.

Quand j’ai dit que M. Wolff a saisi certaines vues que les frères auxquels il s’oppose ont reçues depuis long-temps, ce n’est pas dire qui les leur ait empruntées. Je ne sais où il les a trouvées ; mais je me plais à rendre témoignage qu’il y a un travail très-respectable sur la précieuse parole de Dieu. J’expliquerai où il me semble que de graves lacunes se trouvent dans le système que l’auteur pense y avoir trouvé ; mais au moins il a sondé la Parole sur ce sujet et c’est ce qui est toujours digne de respect.

Remarquons ici un fait frappant. Du moment où l’on sonde la Parole, voilà la théologie et les théologiens qui ne valent rien du tout. Les deux espèces d’imposition des mains, dont la différence forme la base du travail de l’auteur, et il a raison pour le fond, « les anciens théologiens n’ont pas distingué entre elles (p. 27). De là le vague et l’obscurité où ils ont dû se jeter (p. 29). » Et l’auteur ajoute : « Cette confusion dans les idées a eu deux résultats également fâcheux. »

Pauvres théologiens ! quand on veut même à tout prix soutenir « l’imposition des mains qui se pratique de nos jours » (car c’est toujours là le but), au moins est-on obligé d’écarter tout le système sur lequel elle est fondée. Il est impossible, en un mot, de sonder la Parole sans mettre de côté tout le système théologique sur le ministère ; c’est un aveu singulier quand on veut soutenir ce système. Ce qui est vrai, c’est qu’il est impossible de lire la Parole et de suivre un instant le système des théologiens, le système établi quant aux idées. C’est ce que j’ai éprouvé moi-même.

Voici maintenant ce que M. Wolff condamne comme un des fâcheux résultats de la confusion dont il a parlé. J’ai presque peur d’être blâmé comme ironique en le citant, mais sérieusement, il dit, p. 27 : « Les uns ont cru voir dans l’ordination d’un ministre quelque chose de mystérieux, de sacramental ; je ne sais quelle transformation magique qui doit imprimer un caractère indélébile à celui qui la subissait ; et l’orgueil clérical a été favorable à cette erreur. »

Tel est l’un des résultats du système théologique sur l’imposition des mains.

De plus la distinction voulue par l’auteur et que les anciens théologiens ont négligée est, dit-il, d’une si « haute importance, que c’est en elle seule que je vois le moyen de rendre à la consécration du ministre toute sa dignité en la conservant pure d’idées superstitieuses. »

Voilà donc tout le système ancien, sur ce sujet, entièrement condamné. Est-il étonnant que d’autres qui ont sondé la Parole avant M. Wolff l’aient condamné aussi ? Et il ne s’agit pas d’un défaut de théorie seulement ; la consécration des ministres a été entachée « d’idées superstitieuses ; » et « l’orgueil clérical a favorisé l’erreur. » La distinction qui seule pouvait la garder pure ne se trouvant pas dans la théologie.

Et si cela a été vrai d’un côté, comme je le crois pleinement, et que cela soit allé très-loin sur un point très-sérieux qui n’est rien de moins que le Ministère que Dieu a établi dans son Église ; et si, de l’autre côté, j’ai trouvé, comme M. Wolff, que, selon le système dissident, l’évêque ou le pasteur était absolument sans vocation de Dieu, est-il étonnant que, d’un côté, je me sois éloigné des idées superstitieuses favorisées par l’orgueil clérical ; et, de l’autre d’un système qui établit les pasteurs ou évêques sans aucune vocation de Dieu ? C’est ce que j’ai fait, parce que je croyais ce que M. Wolff croit. Je ne sais s’il a encore reçu une consécration conférée selon ces idées superstitieuses ou non. S’il en est ainsi, j’espère que Dieu lui donnera plus de lumière. Si en m’éloignant de l’un et de l’autre je m’assujettis à l’accusation d’être d’une nouvelle secte, je dois la supporter avec patience ; il est évident que c’est ce que la lumière et une bonne conscience demandent ; et alors le blâme des hommes devient de très-peu de poids. Au reste je ne suis pas le premier qui ait été d’une « secte que l’on contredit partout. » Que Dieu nous donne, si nous n’avons pas les mêmes dons, le même courage qu’à celui qui subissait un tel mépris de la part de ceux qui, se disant juifs, étaient menteurs pour la plupart.

Quant à l’imposition des mains, je ne la rejette pas du tout pourvu qu’on la laisse à sa place. Mais je demande si un homme droit, qui désirerait agir selon la Parole, ayant les convictions exprimées par l’auteur de la brochure, ne se serait pas éloigné de la consécration nationale et de la consécration dissidente ? De l’une comme entachée d’idées supersticieuses, et fondée sur une erreur que favorise l’orgueil clérical ; de l’autre comme appliquée à des hommes qui n’ont reçu aucune vocation de Dieu ? Tout en reconnaissant que, malgré cela, il y a des individus bénis des deux côtés. Puis ayant vu que les théologiens avaient tout basé sur un système faux, il aurait attendu afin de voir clairement la volonté de Dieu au lieu de rebâtir les choses que la Parole de Dieu avait renversées.

J’ai assisté à l’imposition des mains faite avec simplicité quand cela n’allait pas au-delà de la lumière que j’avais, et j’y ai assisté avec grande joie. Mais je crois que le Ministère peut s’exercer sans cela, sans que la vocation humaine soit nécessaire ; et je me fonde sur Act. VIII, 4 ; Actes XI, 21 ; Philip. I, 15, etc., etc. ; parce que je vois par ces passages que l’on prêchait, que l’on évangélisait, que l’on annonçait la Parole ; je ne parlerai même ici ni des prophètes, ni de Paul (tous les mots qui peuvent exprimer de la manière la plus élevée l’acte d’annoncer la Parole étant employés sans idée de consécration), et que la main du Seigneur était avec eux. Et parce que je vois et que je crois ce que M. Wolff évite soigneusement de voir et ce qu’il cherche à façonner à son gré, savoir que les ministères qui regardent l’édification de l’Église sont des dons ; et s’ils ne sont pas appelés χαρισματα ils n’en sont pas moins δοματα, dons que Christ a donnés. Et j’en bénis Dieu, parce que son œuvre n’est pas arrêtée ni revêtue d’idées superstitieuses, quoique l’homme ait gâté tout l’ordre extérieur établi par les apôtres.

Ce que je désire, c’est que le ministère soit indépendant et qu’il jouisse de sa vraie dignité, comme étant de Dieu et dépendant de Dieu ; c’est que ce soit le Saint-Esprit qui dirige l’œuvre et les ouvriers ; et que, dans l’Église de Dieu, l’argent devienne serviteur, diacre (et c’est un grand privilège), et non pas maître du ministère.

Souvenons-nous toujours que la consécration des jeunes étudiants, nouvellement sortis d’une académie, est aussi éloignée que possible de l’établissement des anciens dans l’Église ; qu’il n’y a aucune ressemblance quelconque entre les deux choses ; et que, ce que l’on « pratique aujourd’hui, » a introduit dans le ministère, basé sur ce système, des Sociniens, des Rationalistes, des Ariens en masse et leur a conféré tous les droits du ministère.

M. Wolff a été élevé dans une école formée par des hommes que les ministres consacrés selon ce système avaient repoussés du milieu d’eux, parce qu’ils croyaient au fondement du christianisme. Que l’on soit réduit à la nécessité de choisir entre un tel état de choses et un système qui, s’il est plus scripturaire dans ses formes, établit ses charges d’une manière qui exclut la vocation de Dieu, ou de se mettre en dehors de tout ; voilà une des preuves les plus frappantes de l’état de déchéance où se trouve l’Église.

Maintenant quelle est la place accordée à l’imposition des mains ? C’est ce que nous montre le chapitre VI de l’épître aux Hébreux. L’imposition des mains y figure comme un de ces éléments du commencement de Christ ; expression qui, en effet, rattache cette cérémonie à des choses qui existaient avant le don du Saint-Esprit. Il paraît que c’était une cérémonie très-ancienne employée partout en signe de bénédiction.

Le cas de Josué peut être ajouté à ceux indiqués par M. Wolff. Cette cérémonie était employée dans tous les cas comme signe de bénédiction pour les guérisons, pour les enfants, pour ceux qui servaient aux tables et pour beaucoup d’autres. Il ne faut pas je pense confondre le cas des sacrifices avec cette imposition. L’imposition des mains sur la victime identifiait la victime avec le pécheur, ou l’adorateur avec la victime ; c’est ce qu’on voit Héb. VII, 7. Dans ce cas, celui qui imposait les mains à la victime n’était pas un supérieur qui bénissait, ni un frère qui en « recommandait un autre à la grâce de Dieu. » (Act. XIV, 26.) Celui qui offrait un holocauste imposait les mains à la victime et était ainsi présenté à Dieu selon l’acceptation et la bonne odeur de la victime. Dans le sacrifice pour le péché, le péché du coupable était mis sur la victime qui par là devenait péché à sa place. Ni dans l’un, ni dans l’autre de ces cas, il ne s’agissait de bénédiction, on ne conférait rien. Dans l’holocauste, il n’y avait pas même transmission. L’imposition des mains exprimait dans ce cas une idée de représentation. Si l’on veut dire que celui qui reçoit les dons ou une charge doit représenter celui qui les aura conférés, dans ce sens très-général, on peut reconnaître une analogie entre l’imposition des mains sur une offrande et sur un homme pour conférer un don ou revêtir d’une charge. Mais dans les guérisons et le cas des enfants, cette idée se perd aussi. Du reste je ne tiens pas à contester ici quoi que ce soit. L’idée est un peu vague et imparfaite ; mais elle ne touche pas à la question que nous traitons. Un frère, mort depuis bien des années, avait cherché à établir, dans une petite publication, cette analogie et le rapport entre Héb. VI et les sacrifices ; mais il m’a paru qu’il y avait une certaine confusion d’idées entre bénédiction et identification ou représentation. Tout acte de puissance, en bénédiction, se présentait sous la forme d’imposition des mains, les guérisons comme tout autre ; mais alors il n’y avait pas de représentation : dans le cas de l’holocauste, il n’y avait rien de transmis ; l’imposition des mains exprimait une autre idée.

J’admets que dans l’ordre de l’Église, au commencement, le Saint-Esprit était conféré par l’imposition des mains des apôtres, cela est incontestable ; c’était, selon moi, un signe de la puissance apostolique.

Mais l’auteur a complètement méconnu la portée de ce fait, et, en faisant cesser les dons, dont il rattache la possession à l’imposition des mains des apôtres, il a fait cesser la présence du Saint-Esprit dans l’Église. C’est ce que je vais établir.

M. Wolff dit, (pag. 270,) 1° qu’il faut distinguer entre le don et les dons du Saint-Esprit. En cela, il a parfaitement raison : c’est ce que les Irvingiens n’ont pas fait, et c’est ce que l’auteur de cette brochure sur le ministère n’a pas fait lui-même. Aussi, je tiens à rappeler que tout ce qui se trouve en Éph. IV, est appelé là don, non pas χαρισμα τον πνενματος, mais également des dons ; le mot employé, indiquant selon M. Wolff, une libre manifestation de l’Esprit, p. 72, 5° [1].

Examinons maintenant ce sujet très-grave du don du Saint-Esprit ; car il est certain que si M. Wolff a raison, non-seulement il faut renoncer aux dons du Saint-Esprit, mais au don.

Il est possible, selon son système, que nous ne soyons pas obligés de renoncer à la vie que le Saint-Esprit nous a communiquée, à la vie selon la puissance de la résurrection de Christ : mais il faut renoncer au don du Saint-Esprit, comme sceau, et non pas seulement aux dons.

Selon M. Wolff, p. 73 n° 16 et p. 37, les dons communiqués par l’imposition des mains des apôtres étaient une extension du don qu’ils avaient reçu à la Pentecôte. En effet, on voit un même résultat en ce qui arrive le jour de Pentecôte, au Xe chap. des Actes à Césarée, à Samarie (Actes VIII) et à Éphèse (Actes XIX). Ceux qui recevaient le don, parlaient des langues et prophétisaient. Soit à Césarée, où l’Esprit agit d’une manière spéciale, comme témoignage de l’admission des Gentils ; soit à Samarie, où il est communiqué par l’imposition des mains des apôtres Pierre et Jean ; soit à Éphèse, où il est communiqué par l’imposition des mains de Paul, preuve de ses droits apostoliques ; il est évident que, dans tous ces cas, c’était une extension de ce qui est arrivé le jour de Pentecôte. Mais ce qui a eu lieu le jour de Pentecôte, c’était le don du Saint-Esprit lui-même, c’était la promesse du Père, c’était le Consolateur envoyé par le Fils de la part du Père et par le Père au nom du Fils ; c’était l’Esprit de vérité pour convaincre le monde de péché, de justice et de jugement, pour communiquer les choses de Christ à l’Église ; car c’est l’Esprit que Christ a envoyé quand il s’en est allé. Jean XV, XVI. Luc XXIV, 49. C’était cet autre Consolateur qui devait demeurer éternellement avec les disciples, Jean XIV. Mais le don que les apôtres communiquaient ou transmettaient, n’était, de l’aveu de M. Wolff lui-même, « qu’une extension de celui que les apôtres avaient reçu eux-mêmes à la Pentecôte » ; (p. 31). Il ne s’agit pas de renoncer aux dons et de dire qu’ils n’existent plus ; mais il faut dire que l’Esprit, qui a dû demeurer éternellement avec les disciples, n’existe plus sur la terre ; c’est le don qui a été perdu non pas les dons, car l’imposition des mains était une transmission de ce qui avait été reçu ; mais ce qui avait été reçu, c’était le Saint-Esprit, le Consolateur, l’Esprit de vérité ; c’est-là donc ce qui a été perdu. Ceci est évidemment de toute gravité ; et, en même temps, rien n’est plus simple. L’imposition des mains transmettait ce que les apôtres avaient reçu eux-mêmes à la Pentecôte, et c’est là ce qui serait perdu. Mais c’était la promesse du Père, le Saint-Esprit lui-même que les apôtres avaient reçu. C’est donc là ce qui, selon M. Wolff, est perdu ! Que dirons-nous de ceux qui, pour maintenir ce qui se pratique aujourd’hui, traitent avec une légèreté si inconcevable la base de toute puissance, de tout témoignage, de toute manifestation de la gloire de Christ, de l’existence de l’Église, c’est-à-dire, la présence du Saint Esprit lui-même ? De ceux qui recommandent et font circuler avec soin un traité qui ôte absolument à l’Église le Saint-Esprit tel qu’il a été donné à la Pentecôte, le Consolateur ; et qui font cela, soit par préférence pour le clergé, soit par une triste préoccupation qui les empêche de s’apercevoir de ce qu’ils font.

En sommes-nous vraiment venus là que ceux qui se croient les colonnes de l’Église approuvent ce qui nie la présence du Consolateur ; et cherchent, tout en le niant, à nous persuader que l’Église jouit « de toutes les bénédictions primitives ? » Les dons n’étaient que « la manifestation de l’Esprit. » Que nous ayons beaucoup perdu sous ce rapport, hélas ! cela n’est que trop évident. Tout ce qui, sous l’administration apostolique, était un signe public de la présence du Saint-Esprit au monde, et dirigé et conféré même par ce ministère dominant, tout cela est perdu. C’est bien là ce sur quoi j’ai insisté comme une preuve, entre autres choses, de l’état de déchéance où nous sommes ; mais dire, à cause de cela, que le Saint-Esprit n’existe plus dans l’Église, sauf comme grâce de vie, et c’est ce que cette brochure dit, c’est renier la base de toute espérance chrétienne ; c’est ce qui montre en même temps quel est le fond de la question en discussion, et que tout est perdu du côté de ceux qui pensent maintenir un tel système.

Je ne me dissimule pas, que ce que je dis est très-fort. Je ne dis pas que quelques-uns n’aient pas, par ignorance, maintenu ce que je dénonce ; mais le principe professé ici ôte absolument toute source de puissance dans l’Église, tout témoignage rendu par le Saint-Esprit. Il met dehors le Saint-Esprit comme n’existant pas dans l’unité du corps. C’est renier, dans son principe, l’existence de l’Église et la gloire de Christ et tout témoignage à rendre à Christ sur la terre ; car il n’y avait que deux témoignages : l’un celui des douze, parce qu’ils avaient été avec Christ dès le commencement (et nous pouvons ajouter à leur nombre Paul quant à la gloire céleste) ; l’autre, le témoignage du Consolateur envoyé par Christ de la part du Père, de l’Esprit de vérité qui procède du Père, Jean XV, 26, 27. Le témoignage des douze, nous ne l’avons plus personnellement et selon M. Wolff, nous n’avons pas le Consolateur non plus ; car c’est là ce que les apôtres ont reçu le jour de la Pentecôte. Si l’on pense que nous avons la Parole en remplacement des apôtres et du Saint-Esprit, dites-le au moins afin que nous sachions à quoi nous en tenir, et niez hautement, non pas les dons mais la présence du Saint-Esprit dans l’Église. Dites qu’il n’est plus vrai qu’il y ait un seul Esprit et un seul corps. Vous admettez sans doute la grâce pour croire ; mais de ce seul Esprit il n’en est plus question. Quelle confirmation effrayante de la déchéance de l’Église !

Examinons maintenant les passages cités pour l’imposition miraculeuse des mains ; et nous verrons qu’il s’agit de la réception du Saint-Esprit lui-même aussi bien que d’un don particulier conféré quelquefois de cette manière ; et nous verrons en même temps par ces passages et par d’autres que nous allons citer, que la réception du Saint-Esprit n’est jamais confondue avec la foi que le Saint-Esprit a pu produire dans le cœur.

Actes XIX, 2. Avez-vous, dit l’apôtre, reçu le Saint-Esprit quand vous avez cru ? Et ils lui répondirent : nous n’avons pas même ouï dire s’il y a un Saint-Esprit, ou plutôt, si le Saint-Esprit est, c’est-à-dire, si ce baptême du Saint-Esprit dont Jean a parlé avait eu lieu. Il est donc clair ici que, quoique les dons de langues et de prophéties, etc., manifestassent la présence du Saint-Esprit, ils n’avaient pas reçu le Saint-Esprit en aucune manière comme le Consolateur envoyé par le Fils.

Actes VIII, 15. « Qui (Pierre et Jean), y étant descendus, prièrent pour eux afin qu’ils reçussent le Saint-Esprit, car il n’était pas encore descendu sur aucun d’eux ; mais seulement ils étaient baptisés au nom du Seigneur Jésus ; puis ils leur imposèrent les mains et ils reçurent le Saint-Esprit. » On peut bien supposer que le Saint-Esprit se manifesta comme ailleurs, puisque Simon s’en aperçut ; mais il n’en est pas question directement, une chose est claire c’est que les disciples n’avaient pas reçu auparavant le Saint-Esprit.

Actes X, 44. Dans le cas de Corneille le Saint-Esprit descendit sans imposition des mains sur tous ceux qui écoutaient la Parole ; preuve que, quoique l’imposition des mains, selon l’administration ordinaire du temps des apôtres, fût le moyen employé pour communiquer le Saint-Esprit pour que la manifestation de puissance fût là, toutefois Dieu était souverain à cet égard ; cela montre de plus que le Saint-Esprit étant une fois dans l’Église a dû y demeurer éternellement, et que les moyens de sa manifestation étaient un point secondaire. Le Saint Esprit y était, y demeurait toujours ; il ne se bornait pas seulement à donner aux individus de croire ; mais il demeurait dans l’Église comme dans un temple, agissant souverainement pour le bien du corps, selon la volonté et la sagesse de Dieu. Que tous les moyens de manifestation soient en désordre, que la ruine où nous sommes jette de l’obscurité sur toutes ces choses, c’est, là-dessus que j’ai insisté, mais se servir de cela pour nier la présence du Consolateur, c’est faire l’œuvre de l’ennemi ; c’est l’esprit d’incrédulité et d’impénitence.

D’autres passages nous montrent ce sujet sous un autre jour encore, nous faisant voir que le résultat de cette doctrine est de nier le Saint-Esprit comme sceau de la promesse à l’individu ; car cette présence du Saint-Esprit est une chose ajoutée à la foi.

Jean VIII, 38. « Celui qui croit en moi, selon ce que dit l’Écriture, des fleuves d’eau vive découleront de son ventre, (or il disait cela du Saint-Esprit que devaient recevoir ceux qui croyaient en lui ; car le Saint-Esprit n’était pas encore donné.) »

Gal. IV, 6. « Parce que vous êtes enfants, Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans vos cœurs. »

Éphes. I, 13. « En qui vous êtes aussi ayant ouï la Parole de la vérité, l’Évangile de votre salut et auquel ayant cru vous avez été scellés par le Saint-Esprit de la promesse lequel est l’arrhe de notre héritage. »

Nous voyons donc dans ces passages que le sceau du Saint-Esprit est ajouté à la foi ; et si nous n’avons pas ce Saint-Esprit de la promesse, nous ne possédons ni l’Esprit d’adoption, ni les fleuves d’eau vive, ni l’arrhe de notre héritage. Il ne s’agit pas ici des dons, il ne s’agit pas de la puissance dans l’Eglise. Si ce qui était transmis par les apôtres, ce qu’ils avaient reçu le jour de la Pentecôte nous manque, ce qui nous manque c’est le Saint-Esprit de la promesse qui est reçu de ceux qui ont cru, c’est toute source de joie et d’énergie.

Quelle qu’ait été la manifestation qui manque maintenant ; quelle qu’ait été l’administration apostolique qui transmettait le don, si la chose transmise nous manque il ne s’agit pas de dons ; il s’agit, pour l’Eglise et pour le fidèle, du Saint-Esprit lui-même. Ce que les apôtres transmettaient, c’était le Saint-Esprit et non pas seulement des dons. Si cela nous manque, où est l’Église où est le chrétien ? Voyez 2 Cor. II, 21, 22.

De la consécration de l’évangéliste.

Il y a encore une chose à observer sur ce chapitre.

Les prophètes ont imposé les mains sur Paul et Barnabas à Antioche, quand ceux-ci ont été séparés pour leur œuvre parmi les Gentils. Vous penserez sans doute, lecteurs, que saint Paul et même Barnabas, car lui aussi est appelé apôtre, ont agi comme apôtres dans cette mission ; que ce que saint Paul a fait dans toutes les Églises pour ordonner ce qui regardait leur marche, que tout son travail remarquable dans l’Asie mineure, en Macédoine, en Grèce a été un travail apostolique, l’œuvre d’un apôtre. Pas du tout, cela ne peut pas s’accorder avec le système Wolff, parce que l’imposition ordinaire doit être « de haut en bas et jamais de bas en haut… Partout le ministre impose les mains pour une charge inférieure ou égale à la sienne et jamais pour une charge plus élevée. » (p. 32). C’est très juste cela ; mais de plus, dit l’auteur :

« La bénédiction doit toujours être proportionnée dans son importance et son effet à la grandeur de celui qui la donne. Aussi, quand c’est Jésus-Christ qui confère l’imposition des mains, elle opère des miracles, elle guérit des malades, ressuscite des morts. Quand ce sont des apôtres, ils partagent avec de simples fidèles le don miraculeux qui à la Pentecôte fut imposé sur leur tête. » Nouvelle preuve, disons-le en passant, de ce que nous avons dit ; car il est sûr que c’était le Saint-Esprit lui-même, le Consolateur qui est descendu, de sorte que c’est là ce qui est perdu et ce ne sont pas seulement les dons. L’auteur confond la forme spéciale de manifestation et les moyens administratifs de transmission avec la présence même du Consolateur. Enfin, ajoute-t-il, « quand ce sont les autres ministres ils revêtent le candidat de la charge qu’ils ont eux-mêmes reçues. »

Ainsi le ministère qu’a exercé saint Paul n’était pas le moins du monde celui d’un apôtre.

Vous pensez peut-être que je tire des conclusions forcées. Écoutez plutôt M. Wolff. Act. XIII, 1, 2, 3. « Paul et Barnabas, dit-il, page 28, 2° ; sont désignés par le Saint-Esprit pour recevoir la charge d’évangéliste qui doit leur être conférée par leurs collègues. » Ainsi tout le travail de Barnabas ou de Paul n’était pas du tout une œuvre apostolique. C’est un peu fort. « Mais dit M. Wolff, » le texte nous dit expressément « qu’elle (l’imposition) ne leur fut conférée qu’en vue de leur charge d’évangéliste. » Voilà ce que je n’ai pas trouvé. Que les apôtres n’aient pas dédaigné, bien loin de là, cette solennelle recommandation à la grâce de Dieu pour l’œuvre (car c’est ainsi que le Saint-Esprit désigne cette imposition des mains. Act. XIV, 26), voilà ce qui est très-vrai ; mais que ce fût tout simplement une consécration du haut en bas ! Une consécration à la charge d’évangéliste ! Voilà ce qui est certainement un peu fort.

Il y a bien encore un autre embarras. « Les autres ministres, dit M. Wolff, revêtent le candidat de la charge qu’ils ont eux-mêmes reçue. » (p. 32.)

Voilà qui est très-commode pour que des pasteurs fassent des pasteurs de certains jeunes étudiants candidats : mais Barnabas, Siméon, etc. Act. XIII, 1. étaient des prophètes ayant reçu une vocation purement de Dieu et non pas une charge ; et Paul et Barnabas partent comme évangélistes. De sorte que selon M. Wolff les prophètes auraient revêtu les candidats d’une charge qu’ils n’avaient pas reçue eux-mêmes !

J’ai hésité un peu, dans la crainte que ce ne fut déshonorer la précieuse Parole de Dieu, en l’introduisant pour démontrer quel gâchis épouvantable résulte du désir d’autoriser ce qui se pratique. Si j’ai eu tort, que Dieu veuille me le pardonner ; car cela est fort pénible. Mais de telles absurdités et de telles contradictions sont toujours la conséquence d’avoir adopté un système et d’avoir cherché ensuite à l’établir à tout prix par la Parole. Si la Parole a été déshonorée c’est le système qui l’a déshonorée et non pas moi.

De la consécration de l’évêque.

Il ne nous reste plus qu’un point à traiter au sujet de l’imposition des mains.

Nous avons vu ce qui est allégué pour la consécration des évangélistes. Nous avons vu la prédication de la Parole sans consécration indiquée sous tous les noms, Act. VIII, 4 ; ils parlaient, ils évangélisaient ou annonçaient la Parole (λαλουντες) XI, 19 ; les deux mots sont employés verset 20 ; Phil. I, 15, ils prêchaient, ils étaient les hérauts (ϰηρυσσουσιν), mot employé habituellement par saint Paul pour son ministère et par lequel il désigne sa fonction. Le seul cas allégué de la consécration d’un évangéliste, étant la mission des deux apôtres lors de leur départ d’Antioche, il ne nous reste à examiner que la consécration de l’évêque.

Il était nécessaire à M. Wolff de signaler les deux consécrations de l’évêque et de l’évangéliste, parce que cela répond aux évangélistes et aux pasteurs d’aujourd’hui ; ayant vu ce qu’il en est de l’une, voyons ce qu’il en est de l’autre.

J’ai admis la différence quant au fait entre l’imposition par laquelle le Saint-Esprit était communiqué et l’imposition qui se pratiquait ordinairement ; quoique, comme division, elle soit inexacte. Je conviens que quand il s’agit de l’imposition des mains par Timothée, il ne s’agit pas du don du Saint-Esprit ; mais je m’arrête là, tout le reste de la p. 34 de M. Wolff ne contient que des raisonnements dénués de base.

1° Ces raisonnements sont fondés sur l’idée que l’on n’imposait les mains que sur les évangélistes et sur les évêques, ce qui est entièrement faux. Car il n’est jamais dit que l’on imposât les mains sur les évangélistes, et il est bien sûr que l’on imposait les mains sur les diacres, au moins dans le cas des sept. Act. VI.

2° M. Wolff, page 34, allègue en faveur de l’imposition des mains à l’évêque, l’injonction faite à Timothée de n’imposer les mains à personne avec précipitation, 1 Tim. V, 22 ; mais il y a presque toute l’épître entre les règles pour le choix des anciens et ce verset (V, 22) ; et toutes sortes de sujets ont été traités entre les deux passages.

3° Le passage, 1 Tim. (V, 22, ne fait pas suite immédiatement à quelques avis au sujet de l’ancien [2] ; mais il s’applique à la conduite personnelle de Timothée. Je crois qu’il est probable qu’on imposait les mains sur les anciens ; parce que je vois que ce signe antique de bénédiction et de séparation pour une charge était universellement employé, et qu’entre autres choses l’épître traite de la charge d’ancien ; mais il est si peu vrai qu’il soit « impossible d’appliquer à un autre qu’à l’évêque l’imposition dont parle ce passage » qu’il est très-évident que c’est une direction pour la conduite de Timothée, dans tous les cas où il serait appelé à imposer les mains à quelqu’un.

En faveur de l’imposition des mains ayant uniquement l’évêque pour objet, M. Wolff allègue un second passage, savoir, 1 Tim. IV, 14 : « Ne néglige pas le don qui est en toi et qui t’a été donné par prophétie avec imposition des mains des anciens. » Son raisonnement sur ce second texte peut amener à une conclusion plus ou moins juste ; mais qui ne sert qu’à constater le fait que la Parole de Dieu ne dit jamais que l’on doit imposer les mains sur l’évêque. On peut le supposer et raisonner avec assez de probabilité là-dessus, mais la Parole ne le dit pas : tout ce que M. Wolff ose affirmer de ce passage c’est qu’il y fait allusion, mais nous n’avons que ce raisonnement de M. Wolff. Si les anciens ont imposé les mains à Timothée, il faut supposer qu’ils avaient eux-mêmes reçu l’imposition des mains. Mais tout ceci ne touche pas à la question qui consiste à savoir qui les a nommés ces anciens.

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  1. εϰαστῳ διδοτω 1 Cor. XII. — εϰαστῳ εδοθη Éph. IV.
  2. Il peut être appliqué aux diacres aussi bien qu’aux anciens. Les règles pour le choix des diacres sont plus rapprochées du passage que celles données pour le choix des anciens ; mais comme je le dis dans le texte, c’est une règle générale pour la conduite de Timothée et peut s’appliquer à tous cas possible d’imposition des mains.