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Fragments de vases, trouvés à Wittem

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Publications de la société d’archéologie dans le duché de Limbourg
Texte établi par Société historique et archéologique dans le Limbourg,  (1p. 34-37).

FRAGMENTS DE VASES,

TROUVÉS À WITTEM.


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Les objets antiques que nous allons décrire, ont été donnés le 21 avril 1838 au Musée de l’Établissement géographique de Bruxelles par feu M. Roberts, à Maestricht[1]. Ils ont été trouvés à Wittem, probablement vers cette époque. (J’ai lieu de le présumer avec quelque certitude, Monsieur Roberts nous ayant gratifiés le même jour d’ossements d’animaux, provenant également de Wittem) ; je ne puis malheureusement connaître le lieu exact des fouilles faites à cette époque ; je sais pourtant que les ossements précités ont été découverts à trois mètres de profondeur au-delà du pont de Wittem sur la route de Maestricht à Aix-la-Chapelle.

Passons à la description des vases ; sur la planche ils sont tous réduits à une échelle uniforme, leurs dimensions sont indiquées en centimètres.

Fragments de vases trouvés à Wittem.

I. Je n’en possède que quatre fragments. Je suis parvenu à reconstituer les contours et à en préciser les dimensions, en les comparant à la planche II du Tome V 1849, des publications de la Société Archéologique de Luxembourg, relative aux tombes Belgo ou Gallo-Romaines chrétiennes du IVme siècle, découvertes à Steinfort en 1849. J’extrais de ce savant travail de Monsieur le docteur A. Namur les lignes suivantes dont un coup d’œil jeté sur la planche fera comprendre tout l’à-propos.

« Le goulôt assez étroit et allongé est soutenu par deux anses larges, d’une pâte très-fine et filée, qui s’appuient sur un cercle, le corps du vase est orné de cercles placés 6 en haut et 6 en bas.

Il ne me paraît pas sans intérêt de comparer de suite à ce premier vase un autre analogue, décrit par M. Dufresne, trouvé dans une tombe d’un antique cimetière qu’on a exploité en creusant au mois d’avril 1846 le canal de la Marne au Rhin[2].

Tout-à-fait semblable au nôtre, ce vase porte sur le fond une inscription coulée en relief : T. ROREM, que l’on peut interpréter tullit rorem, il porte la rosée, l’eau céleste, l’eau bénite. Comme nous n’en avons que les fragments, et que précisément le fond nous manque, je ne puis savoir, si sous ce rapport il y a aussi parfaite identité.

On voit tout d’abord, dit M. Dufresne, que ce vase appartient à cette classe des ampoules destinées par les premiers chrétiens à contenir l’eau bénite qu’on renfermait dans les tombeaux.

Un vase analogue à celui-ci se trouve au Musée de Mayence[3]. »

On dirait que les lignes précédentes décrivent le vase no I, tant elles s’appliquent à son aspect ; en effet, les différences ne portent que sur de légers détails, le nombre d’anses, et l’inscription abréviée que je crois devoir lire ainsi : F(ert) RO(re)N, l’M se prend pour l’N dit M. de l’Hervilliers dans un article sur les catacombes de Rome (Vérité historique, 1863, p. 185) ; de plus les dimensions sont exactement les mêmes.

L’époque du dépôt de Steinfort a pu être déterminée par un certain nombre de monnaies romaines en petit bronze de la fin du IVme siècle, toutes frappées par des princes chrétiens, et dont la plupart font allusion à la propagation du christianisme[4] à Wittem, absence complète du naulum exigé par l’inexorable Caron, et dont sont ordinairement munis les cadavres de l’époque franque[5] ; on pourrait peut-être, vu l’abréviation de l’inscription, assigner au dépôt de Wittem une époque un peu plus rapprochée de nous que le IVme siècle.

II. Pied de vase en verre, peut-être en forme de flacon, comme les nos 1, 2 et 3 de la planche II, accompagnant le travail précité de M. le docteur Namur, et qui servaient à contenir des aromates.

III. Coupe en verre dont je ne possède que la moitié ; elle est formée de deux épaisseurs, laissant un vide entre elles, et sur les parois duquel adhère fortement un enduit blanchâtre qui se sera produit par l’infiltration des eaux à travers la craie blanche et la glauconie qui forment le sol de Wittem (terrain crétacé de Dumont). J’ai constaté la présence du carbonate de chaux dans cet enduit au moyen de l’acide nitrique.

IV. Morceau d’anse de verre, représentant une feuille d’acanthe ; ce fragment pourrait bien avec celui, figuré sous le no II, faire partie du même flacon ; j’ai crayonné à côté du no IV sa forme probable d’après un des vases trouvés à Steinfort.

V. Goulot de verre un peu trop étroit pour appartenir au vase no I, car il ne se rapporte pas à l’orifice qui est en ma possession.

VI. Deux fragments d’un vase quadrangulaire en terre noire sigillée.

VII. Fragment de vase en terre rouge.

VIII. id. d’urne en terre grise, un petit dessin collé à l’intérieur, gravé et portant la lettre X, me fait supposer que ces objets ont déjà été décrits, j’ignore dans quel recueil. M. Roberts les avait seulement accompagnés de la note suivante : « Mendelin et Foulon supposent qu’il faut placer l’Atuatuca Tungrorum à Wittem, il est constant que les Romains y ont fait quelque séjour comme le prouve le morceau de patère ci-joint. »

(Il faut lire sans doute Wastelain pour Mendelin).

J’ajouterai seulement que Monsieur Schayes dans sa statistique archéologique des Pays-Bas, ne mentionne aucuns restes antiques trouvés à Wittem, l’indication marquée sur ma carte archéologique de la Belgique se rapporte aux seuls fragments dont la description fait le sujet de cet article.

Bruxelles, 21 décembre 1863.

Joseph van der Maelen.
  1. M. André Roberts était un amateur des beaux-arts et un zélé collectionneur à une époque où le goût pour les antiquités du moyen-âge n’était pas encore fort répandu dans le Limbourg. Nous nous plaisons à lui rendre hommage ici et à rappeler qu’il a publié, dans le Journal du Limbourg, un feuilleton sur le P. Dolmans. (Note de la rédaction.)
  2. Mémoires de l’Académie Nationale de Metz, 1849, p. 211.
  3. Zeitschrift des Vereins zur Erforderung der rheinischen geschichte und Alterthumer in Mainz, I Band 1tes heft. fig. 32.
  4. Année 1849, t. V, p. 47 et 48 des Publications de la société Archéologique de Luxembourg.
  5. Tombeaux chrétiens du VIe se découverts à Marilles, dissertation par M. Piot, dans les Précis historiques, 1860, p. 143.