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L’épluchette/Au fond du puits

La bibliothèque libre.
Gérard Machelosse (p. 13-14).


Au fond du puits

Gros-Jean Deschamps, le père de Simplice,
Certain matin, s’était au petit jour
Levé sans bruit, puis, de la basse-cour
Aux bâtiments, comme une ombre il se glisse
Pour accomplir son « train » de tous les jours.
Et, cela fait, il erre à l’aventure,
Examinant champs, prés et leur verdure,
Sans remarquer que Phébus en son cours
S’est avancé. Tout à coup, il y pense ;
Il en devient inquiet, excité,
Car, trop longtemps dehors il est resté.
Ah ! quel émoi doit créer son absence !
À la maison on a dû le chercher
Beaucoup, partout, hors à la bonne place !
Alors il part, vivement se retrace,
Puis c’est bientôt… une course au clocher.
Pendant ce temps sa famille éplorée
Le cherche en vain. Michel, l’un des enfants,
Robuste gars qui compte dix-neuf ans,
Visite à neuf telle place explorée
Déjà vingt fois. Il passe près du puits ;
Il y regarde, assis sur la margelle,
Mais l’onde en bas paraît froide et cruelle
Et ne dit rien. Il est perplexe, puis,

 Subitement, il saisit la brimballe
Et la descend dans le puits jusqu’au fond :
— Si t’es là, p’pa, dit-il, attrape don’
Et quiens toi ben, que je te hâle !