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L’Imitation de Jésus-Christ (Lamennais)/Livre quatrième/06

La bibliothèque libre.
Traduction par Félicité de Lamennais.
Texte établi par M. Pagès, Bonne Presse (p. 298-299).


CHAPITRE VI.

PRIÈRE DU CHRÉTIEN AVANT LA COMMUNION.
Voix du disciple.

1. Seigneur, lorsque je considère votre grandeur et ma bassesse, je suis saisi de frayeur, et je me confonds en moi-même.

Car si je ne m’approche de vous, je fuis la vie ; et si je m’en approche indignement, j’irrite votre colère.

Que ferai-je donc, mon Dieu, mon protecteur, mon conseil dans tous mes besoins ?

2. Montrez-moi la voie droite, enseignez-moi quelque court exercice pour me disposer à la sainte Communion.

Car il m’est important de savoir avec quelle ferveur et quel respect je dois préparer mon cœur, pour recevoir avec fruit votre Sacrement, ou pour vous offrir ce grand et divin sacrifice.

RÉFLEXION.

S’il est nécessaire de préparer son âme avant la prière[1], combien plus avant d’approcher de la divine Eucharistie ? Et c’est pourquoi l’Apôtre dit : Que l’homme s’éprouve soi-même, et qu’il mange ainsi ce pain, et boive de ce calice : car celui qui mange et boit indignement, mange et boit son jugement, ne discernant point le corps du Seigneur[2]. Mais, hélas ! mon Dieu, plus je m’éprouve, plus je me reconnais indigne de m’unir à vous dans le sacrement adorable de votre corps et de votre sang : et cependant, si je ne mange votre chair et ne bois votre sang, je n’aurai point la vie en moi[3] ; de sorte que je suis partagé entre le désir de m’asseoir au banquet sacré où vous invitez vos fidèles, et la crainte d’entendre ces paroles ter ribles : Pourquoi êtes-vous entré ici sans être revêtu de la robe nuptiale ? Jetez-le, pieds et mains liés, dans les ténèbres extérieures ; là sont les pleurs et les grincements de dents[4]. Que ferai-je donc ? Ah ! voici ce que je ferai. Jeme présenterai tel que je suis, dépouillé, nu, misérable, devant mon Seigneur et mon Dieu, et je lui dirai : Ayez pitié de moi, Seigneur, et daignez me revêtir vous-même du vêtement pur, qui me rendra digne d’être admis dans la salle du festin. Si vous ne venez à mon secours, si vous ne suppléez à mon indigence, je serai, ô mon divin Maître, à jamais exclu de votre Table sainte ; mais vous laisserez tomber sur ce pauvre un regard de compassion ; vous viendrez à lui dans votre bonté, dans votre mi séricorde immense, et votre main s’étendra pour couvrir sa nudité : oui, Seigneur, j’ai espéré en vous, et je ne serai point confondu éternellement[5].

  1. Eccli. xviii, 23.
  2. I Cor. xi, 28, 29.
  3. Joann. vi, 54.
  4. Matth. xxii, 12, 13.
  5. Ps. xxx, 2.