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La Peinture en Belgique/Préface

La bibliothèque libre.
G. van Oest (volume 1 : les créateurs de l’art flamand et les maîtres du XVe siècle ; Écoles de Bruges, Gand, Bruxelles, Tournai.p. 1-2).

PRÉFACE

Il y a huit ans, au Cercle artistique et littéraire de Bruxelles, nous terminions une conférence intitulée : De van Eyck à van Dyck, en exprimant le souhait de pouvoir un jour écrire un Guide de l’art en Belgique, où serait exposée l’histoire de la beauté flamande et wallonne à travers les œuvres conservées sur notre sol, dans nos églises, musées, palais, collections. Ce rêve d’une promenade méthodique, engendré par la lecture enthousiaste du Cicerone de Burckhardt, ranimé sans cesse par de réconfortants pèlerinages à nos trésors de nature et d’art, — voici qu’il prend corps.

À dire vrai, pour suivre un ordre consacré et logique, il aurait fallu commencer — et c’était bien notre désir — par l’architecture, continuer par la sculpture pour finir par la peinture. L’ordre est renversé ; nous pensons qu’on ne s’en étonnera pas et surtout qu’on ne s’en plaindra pas trop. Nous ne renonçons nullement, d’ailleurs, à aborder un jour les œuvres d’architecture et de sculpture qui, par malheur, restent toujours insuffisamment inventoriées.

Jusqu’à quel point pourrons-nous accomplir ce projet d’un catalogue général de nos richesses artistiques ? Avec l’aide de M. Van Œst et du public, nous espérons le mener à bonne fin et y joindre même dans la suite quelques chapitres sur notre ancien art décoratif si pénétré, lui aussi, du génie de notre race. En tout cas nous publierons cette année la première partie de la peinture : les Primitifs, formant un tout allant des origines jusqu’au milieu du XVIe siècle environ. Si nous sommes encouragé à poursuivre la réalisation complète de notre programme par ceux que passionne notre art d’autrefois, — et ils sont nombreux, — nous achèverons l’année prochaine notre étude de la peinture par Rubens, son école et le XVIIIe siècle.

La Belgique possède des merveilles sans nombre, que trop souvent les Belges ignorent. À l’aide des exemples illustres ou négligés qui, dans le pays même, témoignent de notre activité artistique de jadis, nous chercherons à retracer la physionomie de nos vieux maîtres, à évoquer leur œuvre entier, à caractériser notre art en ses transformations évolutives, en ses affinités profondes avec notre histoire d’hier et d’aujourd’hui. Nous ne perdrons pas de vue que nous voulons être surtout un « Guide » pour ceux qui veulent connaître les trésors conservés en Belgique. C’est bien une histoire de notre art que nous écrivons ; mais, à quelques rares exceptions près, les illustrations ne reproduisent que des œuvres restées dans notre pays et nos commentaires insisteront surtout sur cette catégorie d’œuvres, alors qu’il nous arrivera de signaler brièvement des productions capitales conservées à l’étranger. Nous pensons que notre travail rendra des services non seulement aux touristes-dilettantes, mais encore aux éducateurs qui auraient l’occasion de parcourir nos musées et nos églises avec leurs élèves. D’autre part, bien des œuvres seront reproduites pour la première fois et notre documentation iconographique sera de nature à intéresser les spécialistes.

Nous n’avons ici d’autre ambition que de servir nos gloires artistiques traditionnelles. Nous voulons, si possible, faire aimer davantage les maîtres qui, par leur rêve réalisé, ont ajouté au charme et à la noblesse de notre terre natale. Si nous ne disons qu’imparfaitement ce que nous souhaitons exprimer, qu’on tienne compte au moins du niveau de nos désirs. Certes il n’est rien de nourrir en soi de vibrantes aspirations ; il faut leur donner forme et vie. Nous ferons de notre mieux.

F.-G. 
 Janvier 1908.