La Première Nuit du sabbat
LA PREMIÈRE NUIT DU SABBAT
Voici mai qui nous sourit ! la forêt s’est dégagée de ses glaçons et de ses frimas. La neige a disparu, et de joyeux chants retentissent parmi la verdure nouvelle. La blanche neige s’est retirée vers les hautes montagnes : il faut cependant que nous y montions, selon la coutume antique et sainte, pour célébrer les louanges du Père de toutes choses. Que la flamme s’élève à travers la fumée : c’est ainsi que les cœurs montent à lui !
Que la flamme s’élève à travers la fumée ! Suivons la coutume antique et sainte de célébrer les louanges du Père de toutes choses. Montons, montons encore !
Mais quelle audace vous transporte ! voulez-vous marcher à la mort ?… Ne savez-vous pas que nos ennemis victorieux sont de ce côté ? Leurs pièges sont tendus autour de ces retraites pour surprendre les païens, les pécheurs !… Hélas ! ils égorgeront dans nos cabanes et nos femmes et nos enfants, et nous marcherons tous vers une mort certaine !
Dans l’asile de nos cabanes, ils égorgeront nos enfants, ces impitoyables vainqueurs ! et nous marcherons tous vers une mort certaine !
Celui vers qui vont s’élever nos sacrifices protégera ses adorateurs. La forêt est libre, le bois n’y manque pas, et nous en ferons d’énormes bûchers. Cependant, arrêtons-nous dans les broussailles voisines, et tenons-nous tranquilles tout le jour ; plaçons des guerriers pour veiller à notre défense ; mais, ce soir, il faut avec courage songer à remplir nos devoirs !
Veillez ici, braves guerriers, aux environs de la forêt, et veillez en silence, pendant qu’ils rempliront leur saint devoir.
Ces chrétiens insensés se laissent abuser par notre audace : si nous les effrayions nous-mêmes au moyen du diable, auquel ils croient ?… Venez ! il faut nous armer de cornes, de fourches et de brandons, faire grand bruit à travers les rochers. Chouettes et hibous, accompagner notre ronde et nos hurlements !
Armons-nous de fourches et de cornes, comme le diable auquel ils croient, et faisons grand bruit à travers les rochers. Chouettes et hibous, accompagnez notre ronde et nos hurlements !
Maintenant, au sein de la nuit, célébrons hautement les louanges du Père de toutes choses ! Le jour approche où il faudra lui porter un cœur purifié ! Il peut permettre à l’ennemi de triompher aujourd’hui et quelques jours encore ; mais la flamme s’élance de la fumée : ainsi s’épure notre culte ; on peut nous ravir nos vieux usages ; mais la lumière divine, qui nous la ravira ?
À moi ! au secours, mes frères !… Ah ! voici l’enfer qui nous vient !… Voyez ces corps magiques tout en feu !… ces hommes-loups et ces femmes-dragons qui se pressent en foule immense ! Oh ! quel tumulte épouvantable ! Fuyons tous, fuyons bien loin !… Là-haut flambe et mugit le diable… et l’odeur infecte des sorciers se répand jusqu’à nous !
Voyez, voyez, ces corps magiques ! hommes-loups et femmes-dragons… Oh ! quel tumulte épouvantable !… Là-haut flambe et mugit le diable… et l’odeur des sorciers se répand jusqu’à nous !
La flamme s’élance de la fumée : ainsi s’épure notre culte ! On peut nous ravir nos vieux usages ; mais la lumière divine, qui nous la ravira ?…