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Les Muses françaises/Ondine Valmor

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Les Muses françaisesLouis-MichaudI (p. 363-369).
ONDINE VALMORE

La fille de l’auteur des Pleurs et de l’acteur Valmore, Hyacinthe-Ondine Deasprdes-Valmore, naquit, le 7 novembre 1821, à Lyon où son père jouait la comédie.

De santé fort délicate, elle passa, en 1841, en Angleterre pour se soigner. Elle devait y rester quelques semaines, elle y resta plusieurs années et en profita pour apprendre l’anglais, traduire les poètes et faire des vers.

Revenue en France, comme ses parents n’étaient pas riches et que sa santé était^meilleure, elle entra en 1845, en qualité de sous-maîtresse à la pension où elle avait fait une partie de ses études.

Un moment Sainte-Beuve songea sérieusement, paraît-il, à en faire sa femme. On ne sait trop pourquoi il ne donna pas suite à ses projetsPeut-être s’était-il rendu compte qu’avec les dix-sept ans qui les séparaient l’un de l’autre, il était bien mûr pour elle ? Le peu de santé d’Ondine lui avait-il donné à réfléchir, ou bien, s’était-il dit que son manque de fortune ne lui permettait pas d’épouser une fille sans dot ?…

Eu 1848, Ondine fut nonamée inspectrice des pensionnats de demoiselles du département de la Seine.

Le 16 janvier 1851, elle épousa M. Jacques Langlais, avocat, député de la Sarthe. Mais cette union fut de courte durée : Ondine ressentit à nouveau les atteintes du mal qui, dix ans auparavant, avait mis ses jours en danger. Elle mourut de la poitrine le 12 février 1853.

Sainte-Beuve nous a laissé d’elle le portrait suivant :

— Ondine « avait des points de ressemblance et de contraste avec sa mère. Petite de taille, d’un visage régulier avec de beaux yeux, elle avait quelque chose d’angélique et do puritain, un caractère sérieux et ferme, une sensibilité pure et élovéo. A la diftéronco do sa mère qui se prodiguait à tous, et dont toutes les heures étaient envahies, elle sentait le besoin de 80 recueillir et de se ré>terver. Ces réserves d’une si jouno sagesse donnaient même parfois un souci et une alarme do tendresse A sa mère qui n’était pas accoutumée à séparer l’alToction de répanchomont ».

Quant à ses poésies, elles n’ont pas été rocucillios et colles que nous donnons ici ont été publiées par JL Léon Séché, qui les devait à l’obligeance de M. S. de Lovonjoul.

M. Léon Séché a oxactoiuont caractérisé ces poésies quand il a dit : « Ondine avait hérité ce don do sa mère, mais elle n’ontondait pas la poésie cojumo elle. Ondine n’était ni une Sapho ni une Ophélie. Son vers no coulait pas à Ilots bouillonnants commo une fontaine do larmes ; 11 était aobro, sérieux, réfléchi, commo sa délicate personne ».

CONSULTER : SAiNTic-HKiivr,. Mme Desbordes-V almore ; correspondance, Paris, 1870, Spobldekoh de Love.iool. Sainte-Beuvt inconnu. — Léon SéchP ;, Saintc-Iieuve, T. II, Paris, 1004.

A SAINTE-BEUVE

L’hirondelle tressjiille. Au premier rayon pur.
L’air tièdo ouvre son aile.

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Voyez ! Les blés viendront, Dieu sourit, l'herbe pousse,
Nous voilà réunis pour aimer et tout voir.

« Oh ! cette fois enfin la nature est constante !
Nos cœurs ont trop souffert pour se tromper encor.
Tout s'émeut, tout renaît sous une main puissante.
Salut ! c'est le bonheur avec ses rayons d'or. »

Mais l'orage est venu. La paisible couvée
A vu fondre l'hiver au milieu de ses jeux ;
Et puis dans l'ouragan mainte plume enlevée.
Sanglante, a tournoyé sous le vent furieux.

Le grand souffle a brisé le nid, seule richesse
De la pauvre famille éperdue; et les bois,
Etonnés et noircis d'une prompte vieillesse,
N'ont plus qu'un sombre écho pour répondre à sa voix.

Maintenant elle part. Pauvre déshéritée !
C'est aux soleils lointains qu'elle se traîne encor.
Plus d'orgueil, plus de chant, l'aile aux vents agitée,
Dans le deuil des chemins tente un tremblant essor.

Ils s'en vont. Un beau jour vaut-il ce qu'il leur coûte,
Le rossignol a fui. Tout est sombre, ils s'en vont ;
Et leur vol inégal hésite sur la route
Où Dieu qui les regarde a dit : « Ils souffriront ! »

L'ANNIVERSAIRE

A MAMAN

Vingt ans ! quoi ! j'ai vingt ans, ma mère, et les journées
Ont apporté cette heure en jouant avec moi !
Quoi! de si courts instants ont formé vingt années !
L'adolescence ainsi courut-elle pour toi '?

Comme au bruit d'une étrange et charmante nouvelle.
J'ai tremblé ce matin en saluant ce jour :
Ce jour tout revêtu de grâce solennelle,
Pour m'annoncer vingt ans me réveille à mon tour.

Mais toi, dis? quel penser dans ton cœur vient de naître!
La surprise ou l'effroi t'ont fait chercher les cieux ;
Tu tremblais. A la fois, soudain j'ai vu paraître
Un sourire à ta lèvre, une larme à tes veux.

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(enfant) {D’afifâs unr aquarelle d^ Berjon de Lyon) 24