Les Oiseaux de proie (Braddon)/Livre 06/Chapitre 02

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Traduction par Charles Bernard-Derosne.
Hachette (tome IIp. 85-107).
Livre VI

CHAPITRE II

SUITE DU JOURNAL DE VALENTIN

« 15 octobre. — Je suis parti pour la Cité, avant midi, après un court déjeuner avec mon ami Horatio, qui, étant ce matin dans ses humeurs noires, faisait un assez triste convive. Je ne devais me présenter chez le digne John Grewter, papetier en gros, que dans l’après-midi ; mais, n’ayant aucune raison particulière pour rester à la maison, j’ai eu la fantaisie d’aller rôder dans le vieux quartier de la Cité où Matthieu Haygarth avait passé sa jeunesse. J’ai été visiter Clerkenwell ; j’ai parcouru les alentours de Smithfield, en pensant au vieux temps des foires, aux ivrognes, et à tous ces farceurs qui, à l’heure qu’il est, font des petits tas de poussière dans les cimetières de la Cité. La grande horloge de Saint Paul a sonné trois heures : je me dis que ce devait être l’heure où M. Grewter se reposait.

« La boutique du papetier m’a paru aussi sombre et aussi triste que le sont en général toutes celles de la Cité ; mais elle exhale je ne sais quelle subtile odeur de richesse qui a un charme mystique pour les narines de celui dont la bourse est vide. Des piles de grands-livres, des montagnes de livres de comptes emplissaient le magasin peu éclairé ; quelques commis travaillaient derrière une cloison vitrée, où le gaz était déjà allumé sous les abat-jour verts placés au-dessus de leurs pupitres. Je me demandai ce que cette existence pouvait avoir d’agréable, s’il était possible, même quand on n’a pas d’autre moyen de gagner sa vie, de s’intéresser à un commerce pareil. Hélas ! pour moi, je n’ai jamais connu d’autres livres de comptes que ceux des paris de courses. Un jeune homme vint s’informer de ce que je voulais, en me regardant de façon à me donner à entendre que, si je n’avais pas besoin de deux ou trois grosses de livres de comptes, je n’avais rien à faire là. Je lui dis que je désirais parler à M. Grewter, et lui demandai si ce gentleman était visible.

« Le commis me répondit qu’il n’en savait rien : il me dit cela d’un ton signifiant clairement que, dans son opinion, je ne serais pas admis à le voir.

« — Vous pourriez peut-être aller vous en informer ? lui suggérai-je.

« — Oui, sans doute. Est-ce le vieux ou le jeune M. Grewter auquel vous désirez parler ?

« — Le vieux M. Grewter, répondis-je.

« — Très-bien. Je vais aller voir. Toutefois, vous feriez bien de me remettre une de vos cartes.

« Je présentai une des cartes de Sheldon.

« En lisant le nom, le commis fit un mouvement comme si un serpent l’eût piqué.

« — Vous n’êtes pas M. Sheldon ? dit-il.

« — Non ; M. Sheldon est mon patron.

« — À quel propos apportez-vous la carte de M. Sheldon ? Je connais M. Sheldon, de Gray’s Inn.

« — Alors, je suis sûr que vous le connaissez comme un homme très-accommodant.

« — Le diable soit de lui ! il m’a presque mis en faillite. Ainsi vous êtes le clerc de M. Sheldon et vous désirez voir notre patron. Vous ne prétendez pas dire certainement que la maison Grewter…

« Cela fut dit sur un ton de frayeur. Je me hâtai de rassurer le commis du papetier.

« — Je ne crois pas que M. Sheldon ait de sa vie vu M. Grewter, dis-je.

« Ceci dit, le commis eut la condescendance d’aller porter mon message dans les parages inconnus situés derrière le magasin. Je commençai à penser que la carte de Sheldon n’était pas la meilleure lettre d’introduction possible.

« Le commis revint presque aussitôt suivi par un homme de haute taille, à barbe blanche, avec une figure franche et une paire d’yeux gris au regard pénétrant, un très-beau spécimen d’octogénaire.

« Il me demanda ce que je désirais d’un air tellement soupçonneux que je dus faire connaître sans circonlocution ce qui m’amenait. Étant maintenant à une plus grande distance du Révérend ab intestat John Haygarth, le secret n’était plus aussi nécessaire. J’informai mon octogénaire que je poursuivais une investigation juridique relativement à un ancien habitant de la rue, et que j’avais pris la liberté de m’adresser à lui dans l’espoir qu’il pourrait peut-être me fournir quelques renseignements.

« Il me regarda tout le temps, comme s’il avait la pensée que je venais lui demander de l’argent. Je dois avouer que j’avais quelque chose du solliciteur. Mais lorsqu’il vit que j’avais seulement besoin de renseignements, ses yeux gris s’adoucirent un peu et il m’engagea à le suivre.

« Son parloir n’était guère moins sombre que sa boutique. Le mobilier semblait être sorti d’une manufacture contemporaine des Meynell, et la lumière du gaz y semblait une sorte d’anachronisme. Après quelques observations préliminaires, peu encouragées par les manières de M. Grewter, je m’informai s’il avait jamais connu le nom de Meynell.

« — Oui, dit-il, il y avait un Meynell qui demeurait dans cette rue quand j’étais jeune… Christian Meynell, un fabricant de tapis. La maison de commerce existe encore, et c’est une très-vieille maison, car elle était déjà ancienne au temps de Meynell. Mais Meynell est mort avant mon mariage, et son nom est aujourd’hui presque oublié.

« N’avait-il pas de fils ? demandai-je.

« — Assurément, oui ; il avait un fils, Samuel. C’était un de mes camarades. Mais il n’a pas pris goût aux affaires, et, après la mort de son père, il a laissé les choses aller à la diable… C’était une espèce d’écervelé. Il est mort deux ou trois ans après son père.

« — Est-il mort célibataire ?

« — Oui. Il avait bien été question d’un mariage avec une Mlle Doberly, dont le père était fabricant de meubles ; mais Samuel était trop extravagant pour les Doberly, qui étaient des gens posés. Il est parti pour l’étranger, où il a pris une espèce de fièvre qui l’a tué.

« — Est-ce que ce fils était le seul enfant de Christian ?

« — Non ; il y avait de plus deux filles. La plus jeune s’est mariée ; l’aînée est venue demeurer avec elle… et elle est morte sans se marier, à ce que j’ai entendu dire ?

« — Savez-vous qui la jeune sœur a épousé ?

« — Non ; elle ne s’est pas mariée à Londres. Elle était allée dans l’intérieur du pays rendre visite à quelques amis… C’est là qu’elle s’est mariée et établie… je ne sais à quel endroit… je n’ai jamais entendu dire qu’elle fût revenue à Londres. La fabrique de tapis a été vendue aussitôt après la mort de Samuel Meynell. Les acquéreurs ont conservé le nom pendant près de vingt ans : « Taylor, successeur de Meynell, maison fondée en 1693, » comme l’annonçait son enseigne placée au-dessus des fenêtres. Le nom de Meynell a été supprimé depuis. Les anciens noms s’oublient, comme bien vous pensez, et il est inutile de les conserver quand ils sont oubliés. »

« Oui, les vieux noms s’oublient, le souvenir des morts s’efface. Le roman de Matthieu semblait être arrivé à une boiteuse et impuissante conclusion, avec ce récit de l’histoire de la fabrique de tapis.

« — Vous ne pourriez pas vous rappeler dans quelle partie de l’Angleterre était allée la fille de Christian ?

« — Non ; je n’y ai pas pris grand intérêt. Je ne crois pas avoir parlé trois fois dans ma vie à cette jeune fille, bien qu’elle demeurât dans la même rue et que son frère et moi eussions souvent occasion de nous rencontrer à une taverne où l’on parlait beaucoup, à cette époque, de l’Empereur Napoléon et de la guerre.

« — N’avez-vous aucune idée de l’époque à laquelle elle s’est mariée ? lui dis-je.

« — Je ne me rappelle pas exactement l’année. C’était après mon mariage, car je me souviens que ma femme et moi étions assis à notre fenêtre, le soir d’un dimanche d’été, et nous avons vu la sœur de Samuel Meynell qui se rendait à l’église. Je me le rappelle comme si c’était hier. Elle avait une robe blanche et un spencer de soie verte… oui… et je n’ai épousé ma première femme qu’en 1814, mais quant à vous dire précisément à quel moment Mlle Meynell a quitté Aldergate Street, je ne le peux pas. »

« Ces réminiscences du passé, si peu importantes qu’elles fussent, semblèrent exercer une influence émolliente sur l’esprit du grand vieillard, dont les regards devinrent moins soupçonneux en même temps qu’il sembla disposé à m’aider dans mes recherches dans la mesure où il le pourrait.

« — Le père de Christian Meynell ne s’appelait-il pas William ? demandai-je après avoir pris quelques notes sur mon carnet.

« — Quant à cela, je ne puis vous le dire. Si Christian Meynell était encore vivant, il ne serait pas, il est vrai, de dix ans plus vieux que moi ; mais je n’étais qu’un petit garçon lorsque son père est mort. Il doit y avoir dans son ancien magasin de vieux livres sur lesquels son nom doit être inscrit, s’ils n’ont pas été détruits.

« Je pris la résolution d’aller m’informer au magasin de tapis, n’espérant qu’à moitié y trouver les livres d’une époque depuis laquelle près d’un siècle s’était écoulé. Je hasardai une autre question.

« — Sauriez-vous si Christian Meynell était fils unique ou le seul fils qui fût arrivé à l’âge d’homme ? lui demandai-je.

« Mon vieux camarade secoua la tête.

« — Christian Meynell n’a jamais eu aucun frère, autant que j’ai pu le savoir, dit-il ; mais les registres de la paroisse vous renseigneront à ce sujet, si, comme je le pense, le père de Christian a passé toute sa vie dans Aldergate Street. »

« Après cela, je fis quelques autres questions au sujet des églises du voisinage ; puis ayant remercié M. Grewter de sa politesse, je pris congé de lui.

« J’ai dîné avec ce qui s’est trouvé à la maison, et j’ai employé le reste de ma soirée à la rédaction de ce journal : puis à une tendre rêverie dans laquelle la figure de Charlotte occupait le plan principal.

« Combien la pauvreté et la dépendance ont mis d’amertume dans l’esprit de Diana. C’était pourtant une si aimable fille !…

« 16 octobre. — Mon travail d’aujourd’hui a été limité aux investigations des registres de paroisses ; une fort ennuyeuse besogne, tout au moins ; mes efforts n’ont heureusement pas été tout à fait infructueux. Dans la belle et vieille église de Saint Giles, j’ai trouvé les registres contenant la mention du baptême d’Olivier Meynell, fils de William et de Caroline Mary Meynell, 1768, ainsi que de l’enterrement du même Olivier dans l’année suivante. J’ai trouvé l’inscription du baptême d’une fille des mêmes William et Caroline Mary ; et, plus loin, l’enterrement de ladite fille, âgée de cinq ans. J’ai également trouvé les mentions du baptême de Christian Meynell, fils des mêmes William et Caroline Mary, dans l’année 1772. Plus tard ; se trouve l’inscription du décès de Sarah, veuve de Christian Meynell. Plus tard également, le baptême de Samuel Meynell, puis le baptême de Susan Meynell, et enfin, celui de Charlotte Meynell.

« Ce sont là les seules inscriptions que renferment les registres au sujet de la famille Meynell. Il n’y est aucunement fait mention de l’enterrement de Caroline Mary, femme de William Meynell, ni de celui de Christian Meynell, ni de Samuel Meynell, son fils. La constatation de ces derniers est cependant indispensable à Sheldon pour rendre sa réclamation valable. Après avoir terminé mes recherches dans les registres, je suis entré dans le cimetière pour y chercher le caveau de famille des Meynell ; je l’ai trouvé sous la forme d’un vieux monument carré, entouré d’une grille, presque entièrement dévorée par la rouille, mais supportant encore des inscriptions commémoratives des noms et des vertus des trépassés. Ce champ de repos renferme une compagnie plus distinguée que celle des Meynell. John Milton, John Fox, l’auteur du Martyrologe, et John Speed, le chronologiste, y ont également trouvé leur dernière demeure.

« Dans l’espoir d’obtenir quelque nouvel éclaircissement, je me suis hasardé à faire une seconde visite à M. Grewter.

« Cette fois, je l’ai trouvé assez mal disposé à s’occuper d’une affaire qui ne devait lui procurer aucun profit, chose qu’il m’a nettement déclarée être contraire à ses principes. Je crois bien que cette manière d’envisager les choses est celle des commerçants en général.

« Je lui demandai s’il ne pourrait pas me dire où Samuel Meynell avait été enterré.

« — Je présume qu’il a été enterré à l’étranger, répliqua avec une aigreur croissante le vieux gentleman, puisque c’est à l’étranger qu’il est mort.

« — Ah ! il est mort à l’étranger… Pourriez-vous me dire en quel lieu ?

« — Non, monsieur, je ne le puis pas, répliqua M. Grewter encore plus aigre. Je ne m’occupais pas des affaires des autres à cette époque et je ne m’en occupe pas davantage aujourd’hui. Je n’aime pas non plus à être dérangé à ce propos par des étrangers.

« Je m’excusai autant que possible de mon importunité ; mais cela ne put apaiser l’enragé Grewter.

« — Votre meilleure excuse sera de ne plus la renouveler, répliqua-t-il. Ceux qui connaissent mes habitudes savent que je suis dans l’usage de faire un somme d’une demi-heure après mon dîner. Cela est nécessaire à ma santé, sans cela je ne le ferais pas. S’il ne s’était pas trouvé que j’aie un nouveau garçon de magasin, vous ne m’auriez pas dérangé deux après-midi de suite.

« Jugeant qu’il était impossible d’apaiser M. Grewter, je le quittai pour aller chercher un esprit plus pacifique dans la personne de M. Anthony Sparsfield, sculpteur en bois et doreur, à Barbican.

« Je trouvai facilement l’établissement de Sparsfield et fils, sculpteurs-doreurs. C’était une sombre boutique basse, sur les croisées de laquelle étaient exhibés plusieurs cadres entourés d’ornements sculptés très-avantageux pour les mouches et une peinture à l’huile dans le mystérieux style de Rembrandt. L’air de vétusté qui caractérisait presque toutes les boutiques du voisinage était particulièrement apparent dans l’établissement de Sparsfield.

« Dans la boutique, je trouvai un homme d’une quarantaine d’années, à la figure douce, qui causait avec une pratique. J’attendis patiemment que cette pratique eût terminé une minutieuse description du cadre qu’elle désirait pour placer une série d’épreuves avant la lettre de gravures d’après Landseer. Puis, lorsque la pratique fut partie, je demandai à l’homme à la figure douce si je pouvais voir M. Sparsfield.

« — C’est moi qui suis M. Sparfield, répliqua-t-il poliment.

« — Vous n’êtes pas M. Anthony Sparsfield ?

« — Je vous demande pardon, mon nom est Anthony.

« — J’avais entendu dire que M. Anthony Sparsfield était une personne beaucoup plus âgée.

« — Oh ! vous voulez sans doute parler de mon père, répliqua-t-il : mon père est vieux et ne s’occupe plus guère des affaires maintenant ; non que sa tête ne soit toujours aussi bonne. Il y a même d’anciens clients qui préfèrent le voir lorsqu’ils viennent faire leurs commandes.

« Cela était de bon augure. Je dis à M. Sparsfield que je n’étais pas un client et lui exposai la nature de mon affaire. Je le trouvai aussi bien disposé que M. Grewter avait été désobligeant.

« — Mon père et moi sommes des gens taillés sur le vieux patron, dit-il, qui ne tenons pas à paraître au-dessus de notre état, comme le font aujourd’hui beaucoup d’autres commerçants. Le vieux gentleman prend son thé en ce moment dans le parloir, au premier, et si cela ne vous dérange pas de monter près de lui, je suis sûr qu’il se fera un plaisir de vous donner tous les renseignements qu’il pourra. Il aime beaucoup à parler du passé. »

« C’était bien là le type du vieil habitant que j’avais besoin de rencontrer, un type bien différent de M. Grewter, qui apportait dans ses réponses à mes questions autant de parcimonie que s’il eût fallu me donner à chaque fois une banknote de cinq livres.

« Je fus conduit à un joli salon, au premier étage, dans lequel flambait un gai foyer et où l’on aspirait une agréable odeur de thé et de pain grillé. L’on m’invita à prendre une tasse de thé, et, voyant qu’en acceptant je serais considéré comme un homme aimable, j’acceptai. Le thé était très-chaud, mais très-faible et très-doux ; M. Sparsfield et son fils ne le dégustèrent pas moins avec autant de plaisir que si c’eût été le plus exquis des nectars.

« M. Sparsfield l’aîné avait quelques rhumatismes et était légèrement asthmatique, mais c’était malgré tout un joyeux vieillard, très-disposé à parler des vieux temps où Barbican et Aldergate Street étaient bien autrement agréables qu’aujourd’hui, ou du moins lui avaient paru tels.

« — Meynell !… s’écria-t-il. J’ai connu Samuel Meynell aussi bien que si c’eût été mon propre frère, et j’ai connu le vieux Christian Meynell presque comme si c’eût été mon père. Il y avait plus de sociabilité à cette époque, voyez-vous, monsieur, Il semble aujourd’hui que le monde soit trop plein pour laisser place à l’amitié. Il n’y a plus que lutte et concurrence, concurrence et lutte partout. Un homme vous fera maintenant pour vingt-cinq shillings un cadre qui aura plus d’apparence que celui que je pourrais faire pour cinq livres. Seulement, la dorure sera complétement partie au bout d’un an. Voilà comment le monde marche aujourd’hui. Il y a beaucoup de choses dorées qui ont de belles apparences, mais cela ne dure pas.

« Après avoir laissé au bonhomme le temps de moraliser à son aise, je le ramenai poliment au sujet qui m’intéressait.

« — Samuel Meynell était le meilleur garçon qui eût jamais existé, dit-il ; mais il aimait trop la taverne. Il y en avait à cette époque de très-agréables où l’on avait l’habitude de se réunir pour causer des choses du jour, on se tenait compagnie, en prenant un verre de liqueur et en fumant une pipe. Le pauvre Samuel Meynell y prenait un peu trop de sa liqueur favorite, et lorsque la jeune femme à laquelle il faisait la cour, Mlle Doberly, lui a manqué de parole, en se mariant avec un boucher en gros, lequel était assez vieux pour être son père, Samuel s’est adonné tout à fait à la boisson ; il a négligé ses affaires. Un jour il vint à moi et me dit : « Tony, j’ai vendu ma maison de commerce, » entre nous, nous nous disions Tony et Samuel, voyez-vous, monsieur, « et je vais partir pour la France ! » C’était peu de temps après la bataille de Waterloo ; beaucoup de gens avaient la fantaisie d’aller en France à cette époque. On n’appelait plus alors l’Empereur Napoléon que l’Ogre de Corse et le Tigre, comme depuis on a appelé l’Empereur Napoléon III Badinguet et le reste ; les Français ne sont jamais idiots à moitié ! On disait aussi que les Français ne mangeaient que des grenouilles. Enfin, monsieur, nous fûmes tous très-surpris d’apprendre que Samuel s’en allait à l’étranger, mais comme il avait toujours été très-extravagant, on ne vit là qu’une nouvelle folie de sa part, et nous avons été moins surpris en apprenant une ou deux années après qu’il s’était enivré à en mourir avec du brandy à bon marché, ce qu’ils appellent eau-de-vie, les pauvres ignorants, à Calais.

« — Il est mort à Calais ?

« — Oui, répliqua le bonhomme. J’ai oublié qui nous en a apporté la nouvelle, mais je me souviens parfaitement du fait. Le pauvre Samuel est mort et a été enterré là.

« — Vous êtes sûr qu’il a été enterré à Calais ?

« — Oui, aussi certain qu’il soit possible de l’être. Les voyages, à cette époque, n’étaient pas chose facile ; on ne trouvait à l’étranger que des diligences, qui, d’après ce que j’ai entendu dire, étaient le véhicule le plus lent que l’on ait jamais inventé. Il n’y avait plus personne pour ramener en Angleterre les restes du pauvre Samuel, car sa mère était morte et ses deux sœurs étaient établies quelque part dans le comté d’York.

« Dans le comté d’York ! Je ne serais pas surpris que ma physionomie eût paru extraordinaire au moment où M. Sparsfield mentionna ce comté particulier, car ma pensée prit des ailes pour s’élancer vers Charlotte presque aussitôt que le mot sortit de ses lèvres.

« — Comment, Mlle Meynell s’est établie dans le comté d’York ? dis-je.

« — Oui, elle a épousé un fermier de ce pays ; sa mère était née dans le comté d’York, et elle-même s’y étant rendue avec sa sœur pour aller rendre visite à quelques parents du côté maternel, elle y est restée et n’est jamais revenue à Londres depuis. L’une des deux s’est mariée ; l’autre est morte fille.

« — Vous rappelez-vous le nom de l’homme qu’elle a épousé ?

« — Non, répliqua M. Sparsfield, Pour cela, j’ai tout à fait oublié.

« — Ne pourriez-vous pas vous rappeler le nom de l’endroit où elle a été… de la ville, du village, du bourg ?

« — Je me le rappellerais peut-être si je l’entendais nommer, répondit-il d’un air pensif. Je devrais pourtant me le rappeler, car j’ai entendu bien des fois, dans le temps, Samuel parler de la résidence de sa sœur Charlotte. On l’avait baptisée Charlotte, voyez-vous, à cause de la reine. J’ai une espèce de souvenir que le nom du village se terminait en cross, comme qui dirait Charing-Cross ou Waltham-Cross.

« Cela était vague, mais c’était néanmoins infiniment plus que ce que j’avais pu extraire de M. Grewter. Je prie une seconde tasse de l’innocent thé de mes hôtes, afin d’avoir un prétexte pour prolonger ma visite et chercher à faire jaillir quelque lumière de la mémoire du vieux sculpteur en bois.

« Je ne pus néanmoins y parvenir. Je fus, par conséquent, obligé de battre en retraite, mais en me réservant le privilège de renouveler ma visite si l’occasion s’en présentait.

« 18 octobre, — J’ai envoyé avant-hier, à Sheldon, un extrait de mon rapport, et j’ai eu hier matin une longue entrevue avec lui. Il avait examiné avec le plus grand soin les renseignements que j’avais recueillis, et il approuvait mon travail.

« — Vous avez admirablement bien réussi, en considérant le peu de temps que vous y avez mis, dit-il ; vous avez dû vous féliciter de trouver le terrain préparé pour vous comme jamais il ne l’a été pour moi. La branche des Meynell semble se circonscrire dans la personne de la fille de Christian et ses descendants ; notre plus importante affaire maintenant est de découvrir quand, où, et avec qui elle s’est mariée, et ce que ce mariage a pu produire. Je pense que vous êtes en état d’y parvenir ?

« Je secouai la tête de l’air d’un homme qui doute.

« — Je ne puis espérer trouver le nom du mari de cette jeune dame, dis-je, à moins de rencontrer quelque autre vieillard doué d’une meilleure mémoire des noms et des lieux que mon obligeant Sparsfield ou mon revêche Grewter.

« — Il y a des hospices, dit Sheldon ; vous n’avez pas encore tenté cette voie-là ?

« — Non ; il me faudra donc visiter les hospices, répliquai-je avec la résignation du pauvre que son dénûment oblige à tout faire, bien que, je l’avoue, l’insipide verbiage des vieillards des hospices dépasse presque ce que je puis supporter.

« — Eh ! qui vous dit que vous ne pourrez pas obtenir le nom de l’endroit de votre ami le doreur ! dit George. Il vous a mis en quelque sorte sur la voie en vous disant que le nom finit en cross. Il croit qu’il se rappellerait le nom s’il l’entendait prononcer. Pourquoi ne pas tenter cette épreuve avec lui ?

« — Mais, pour la faire, il faudrait que je susse le nom moi-même, répliquai-je, et dans ce cas je n’aurais pas besoin de l’assistance de Sparsfield.

« — Vous n’êtes pas fertile en expédients, dit Sheldon en se renversant sur sa chaise pour prendre sur une tablette un petit livre très-vieux, comme tous ceux qui l’entouraient. Voici un Dictionnaire des Communes, dit-il en l’ouvrant à la table des matières. Nous éprouverons la mémoire du vieux Sparsfield avec tous les cross qui se trouvent dans le comté, et si le moindre écho du nom se rencontre encore dans son faible cerveau nous parviendrons à l’éveiller.

« Mon patron se mit alors à parcourir avec l’ongle de son doigt l’une des colonnes de l’index du livre.

« — Prenez votre crayon et écrivez les noms à mesure que je les appellerai, dit-il. Nous y voici. Aysley-Cross… En voilà encore d’autres : Bowford-Cross, Callindale-Cross, Huxter’s-Cross, Jarnham-Cross, Kingboroug-Cross…

« Puis, après avoir lu attentivement la colonne, il s’écria :

« — Voilà tous les cross qui se trouvent dans le comté d’York ; ce sera bien le diable si vous ou moi ne parvenons pas à découvrir dans l’un d’eux les descendants de la fille de Christian. La fille elle-même peut bien exister encore, d’après le peu que nous en savons.

« — Et que comptez-vous faire au sujet de Samuel Meynell, mort à Calais ? Vous aurez sans doute à fournir la preuve de sa mort ; car je présume que dans une affaire de ce genre, il faut que l’on puisse tout prouver.

« — Très-certainement, il me faudra prouver le décès de Samuel, expliqua l’ardent généalogiste ; j’en fais mon affaire et m’en occuperai moi-même pendant que vous ferez la chasse à la branche femelle de Meynell. J’ai besoin de prendre l’air après un aussi rude travail. Je ferai un saut jusqu’à Calais pour y chercher le registre où est relatée l’inhumation de Samuel. Je présume que l’on aura pris la peine de le faire enterrer, bien qu’il fût étranger.

« — Et si je parviens à extraire de la mémoire du vieux Sparsfield le nom que nous cherchons ?

« — Dans ce cas, vous vous rendrez immédiatement à l’endroit et commencerez vos recherches sur les lieux. Il doit y avoir environ cinquante ans que cette femme s’est mariée ; vous pourrez encore rencontrer quelque habitant assez âgé pour l’avoir connue et se la rappeler. Oh ! à propos de cela, je pense qu’il vous faudra de l’argent pour les frais ? ajouta Sheldon avec un soupir.

« Il prit dans son portefeuille une banknote de cinq livres qu’il me remit comme s’il eût fait un grand sacrifice personnel. Je sais qu’il est pauvre et que c’est en en pressurant d’autres, non moins pauvres que lui, qu’il parvient à gagner quelque argent : une partie de cet argent est risquée par lui comme une spéculation sur les chances de la succession Haygarth, de même qu’il a autrefois spéculé sur des chances qui ne promettaient pas autant de profit.

« — Trois mille livres ! me dit-il, pendant qu’il me tendait la pauvre petite banknote ; songez quelle belle prime cela est et travaillez pour l’obtenir le mieux que vous pourrez. Plus nous approchons du but et plus nos progrès me paraissent lents ; cependant, tout compte fait, ils ont été très-rapides.

« Il faut que je sois devenu bien sentimental, car l’impossibilité de réaliser ces trois mille livres occupait moins ma pensée que la perspective d’avoir à me rendre dans le comté d’York, ce comté où Charlotte est née, ce comté où elle se trouvait en ce moment même. Je me rappelais néanmoins que c’est le plus vaste comté de l’Angleterre et que de toutes les coïncidences de temps et de lieu il n’y en avait pas de moins probable que celle qui pourrait amener une rencontre entre Charlotte et moi.

« — Je sais qu’en fait je ne serai pas moins séparé d’elle dans le comté d’York qu’à Londres, me dis-je à moi-même ; mais j’aurai le plaisir de m’imaginer que je m’en trouve plus près.

« Avant de quitter George je lui fis part du lambeau de conversation entre Paget et Philippe que j’avais surpris à La Pelouse, mais il repoussa mes soupçons avec dédain.

« — Je vais vous dire ce que je pense, Haukehurst, me dit-il en fixant sur moi ses yeux noirs perçants. Le capitaine, non plus que mon frère, ne peuvent avoir aucune connaissance de notre affaire, à moins que vous ne soyez un traître et leur ayez vendu nos secrets. Mais, écoutez bien, si vous avez fait cela, vous vous êtes trompé vous-même et eux en même temps. J’ai dans les mains les pièces capitales sans lesquelles tout ce que vous pouvez savoir ne peut servir absolument à rien.

« — Je ne suis pas un traître, lui répondis-je tranquillement, car je sens trop de mépris pour lui pour que rien de ce qu’il lui plaît de me dire puisse m’inspirer de la colère. Je n’ai jamais dit un seul mot de nos affaires ni au capitaine, ni à votre frère. Si vous commencez à vous défier de moi, il est temps que vous cherchiez à vous procurer un autre collaborateur.

« À l’instant même, mon Sheldon fut à mes pieds, moralement parlant.

« — Ne tournez pas au mélodrame, Haukehurst, dit-il. Il y a, tous les jours de la semaine, des gens qui se vendent, et personne ne blâme le vendeur, pourvu qu’il fasse un bon marché. Seulement, dans la circonstance, ce serait un marché très-bête.

« Après cet entretien, je pris congé de Sheldon : il se proposait de partir pour Calais le jour même par le train du soir ; il ne devait en revenir que lorsqu’il aurait complété ses investigations ; s’il me trouvait absent à son retour, il en conclurait que j’aurais obtenu le renseignement désiré, et que j’étais parti pour le comté d’York : dans ce cas, il attendrait patiemment que je lui donnasse de mes nouvelles. Je m’en fus directement chez Sparsfield. J’avais passé la plus grande partie de la journée dans le bureau de Sheldon, de sorte que quand je me présentai devant mon complaisant Sparsfield junior, Sparsfield junior était déjà sur le point de se mesurer avec le thé et les rôties. Je fus de nouveau invité à monter au premier, au salon de famille, où, comme la première fois, je fus traité avec cette simple confiance et cette bienveillance que j’ai eu la chance de rencontrer aussi souvent dans le cœur de cette grande ville dépravée que dans le plus innocent village. Avec des gens aussi cordiaux, je ne pouvais faire autrement que d’agir cordialement.

« — Je crains de vous paraître importun, M. Sparsfield, lui dis-je, mais je ne doute pas que vous ne me pardonniez, lorsque vous saurez que l’affaire dont je m’occupe a pour moi une importance vitale, et que votre aide peut m’être d’un grand secours pour la conduire à bonne fin.

« M. Sparsfield senior m’affirma qu’il avait toujours été prêt à aider ses semblables, et eut l’amabilité d’ajouter qu’il avait de la sympathie pour moi. Je suis depuis quelque temps devenu si sensible en matière de sentiment, que je m’empressai de le remercier de sa bonne opinion, après quoi je lui fis connaître que j’allais mettre sa mémoire à l’épreuve.

« — Et ce n’est pas une mémoire de pacotille, s’écria-t-il gaîment en croisant les mains sur ses genoux. N’est-ce pas, que j’ai une bonne mémoire, Tony ?

« — Il y en a peu de meilleures, mon père, répondit le respectueux Anthony junior. Votre mémoire est de beaucoup meilleure que la mienne, j’en suis très-persuadé.

« — Ah ! dit le bonhomme, en riant de bon cœur, c’est qu’on vivait autrement de mon temps. Il n’y avait pas de gaz, il n’y avait pas de chemins de fer, et les commerçants de Londres se contentaient de vivre des années dans la même maison. Maintenant, il faut qu’un commerçant aille faire sa tournée à l’étranger comme un prince de la famille royale, qu’il s’en aille ici et là, et quand il a été partout, il ne sait plus lire que les journaux. Les gens restaient chez eux de mon temps, mais ils y faisaient leur fortune, ils conservaient leur santé, leur clairvoyance, et leur mémoire, aussi bien que leur intelligence ; ce qui fait que beaucoup d’entre eux ont vécu assez longtemps pour voir les folies de la génération qui les a suivis.

« — Ah ! mon Dieu, père !… s’exclama Anthony junior, abasourdi par ce flot d’éloquence, quel sermon !

« — Je n’en fais pas souvent de sermons, dit le bonhomme en riant. Tout ce que je veux dire, c’est que si j’ai encore la mémoire assez nette, c’est sans doute parce que je n’en ai pas fait mauvais usage, je ne l’ai pas employée à des absurdités comme beaucoup d’autres. Je suis resté chez moi, m’occupant de mes affaires et laissant les autres s’occuper des leurs ; maintenant, monsieur, si vous avez besoin de moi, je suis prêt.

« — Vous m’avez dit l’autre jour que vous ne pouviez pas vous rappeler le nom du lieu, où s’est mariée la fille de Christian Meynell ; mais que peut-être, vous vous le rappelleriez si vous l’entendiez prononcer. Vous avez dit aussi que ce nom finissait en cross.

« — Je le maintiens, répliqua mon vieil ami, je le maintiens.

« — Très-bien, alors. Il est convenu que ce lieu est dans le comté d’York ?

« — Oui, je suis également certain de cela.

« — Et que le nom se termine en cross.

« — Aussi vrai que je m’appelle Sparsfield.

« — Eh bien ! en ce cas, comme il y a seulement six villes ou villages dans le comté d’York, dont les noms finissent par cross, il y a tout lieu de croire que l’endroit que nous cherchons doit être dans les six.

« L’ayant ainsi préparé, je tirai ma liste de ma poche et je lus tout haut, très-lentement, les noms des six places pour l’édification de M. Sparsfield.

« Aysley-Cross, Bowford-Cross, Callindale-Cross, Huxter’s-Cross, Jarnham-Cross, Kingborough-Cross.

« — C’est celui-là ! s’écria soudainement mon vieil ami.

« — Lequel ? lui demandai-je avidement.

« — Huxter’s Cross… je me rappelle d’avoir pensé dans le temps que ce devait être un lieu d’approvisionnement à cause du nom de Huxter, voyez-vous, prononcé comme s’il était écrit avec cks au lieu de x. J’ai su après qu’il y avait eu là autrefois un marché, lequel n’existait déjà plus à cette époque. Huxter’s Cross ; oui, c’est bien là le nom de l’endroit où la fille de Christian Meynell s’est mariée et établie. Je l’ai entendu dire souvent au pauvre Samuel, et il me revient maintenant, comme si je ne l’avais jamais oublié.

« Le vieillard avait un air de conviction qui me fit croire qu’il ne se trompait pas. Je le remerciai de tout cœur et pris congé de lui.

« — Il peut se faire que vous ayez contribué à mettre un lingot d’argent dans ma poche, M. Sparsfield, lui dis-je, et si cela est je ferai faire mon portrait, ne fût-ce que pour avoir le plaisir de vous le donner à encadrer.

« Après cette phrase de bénédiction, je quittai mes simples citoyens. Je me sentais le cœur léger pendant que je traversais les déserts métropolitains qui s’étendent entre Barbican et Omega Street. Je rougis de moi quand je me rappelle la folle cause de cette exaltation. J’allais aller dans le comté d’York, le comté qu’habitait maintenant ma Charlotte. Ma Charlotte !… Il y a du bonheur, même à écrire ce délicieux pronom possessif… le bonheur de la laitière qui se rend au marché avec son pot au lait.

« Personne peut-il savoir mieux que moi que je ne serai pas moins éloigné de Charlotte dans le comté d’York que je le suis à Londres ? Personne. Et cepenpant je suis heureux que l’affaire Sheldon me conduise vers les prés et les bois de ce vaste comté du Nord.

« Huxter’s Cross… quelque lieu abandonné sans doute. J’ai acheté sur ma route, ce soir en revenant, un Indicateur des chemins de fer. Je me suis mis à étudier soigneusement les moyens de communication avec cette localité, dans les archives moisies de laquelle j’ai à découvrir l’histoire de la fille et héritière de Christian Meynell.

« Je trouve que Huxter’s Cross n’est pas sur la ligne même du chemin de fer. On y arrive en descendant à une petite station obscure, si j’en juge par les caractères microscopiques avec lesquels son nom est écrit, environ à soixante milles au nord de Hull. Le nom de la station est Hidling, et à Hidling il paraît qu’il y a une voiture publique faisant le service entre la station et Huxter’s Cross.

« Vous faites-vous une idée, mon cher, de l’héritier d’une fortune de cent mille livres végétant dans les régions ignorées de Huxter’s Cross-Hidling sans avoir conscience de sa félicité ?

« Le trouverai-je à la charrue, ce muet et insouciant héritier légal, ou sous la forme d’une héritière aux bras brunis prosaïquement occupée à battre du beurre, ou bien découvrirai-je que le dernier des Meynell repose dans quelque cimetière abandonné où aucune voix ne saurait plus troubler son sommeil pour le prévenir de la bonne fortune qui l’attend ?

« Je vais dans le comté d’York ; cela me suffit. Il me tarde de voir partir le train qui m’y conduira. Je commence à comprendre la nostalgie des montagnards ; j’aspire après l’air du Nord, cette fraîche brise qui souffle des montagnes, sur les forêts, les plaines. Je soupire… le cœur me bat, en pensant au comté d’York… moi, le badaud de Londres, l’enfant de Temple Bar, dont l’enfance s’est passée au son des cloches de Saint Dunstan et de Saint Clément-le-Danois. Le comté d’York, n’est-ce pas le lieu de naissance de ma Charlotte ?

« J’ai hâte de connaître un pays qui produit d’aussi radieuses créatures.