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Page:Œuvres complètes de Guy de Maupassant, XVI.djvu/16

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LA PETITE ROQUE.

heurté contre une barre de bois ; car, à dix pas devant lui, gisait, étendu sur le dos, un corps d’enfant, tout nu, sur la mousse. C’était une petite fille d’une douzaine d’années. Elle avait les bras ouverts, les jambes écartées, la face couverte d’un mouchoir. Un peu de sang maculait ses cuisses.

Médéric se mit à avancer sur la pointe des pieds, comme s’il eût craint de faire du bruit, redouté quelque danger ; et il écarquillait les yeux.

Qu’était-ce que cela ? Elle dormait, sans doute ? Puis il réfléchit qu’on ne dort pas ainsi tout nu, à sept heures et demie du matin, sous des arbres frais. Alors elle était morte ; et il se trouvait en présence d’un crime. À cette idée, un frisson froid lui courut dans les reins, bien qu’il fût un ancien soldat. Et puis c’était chose si rare dans le pays, un meurtre, et le meurtre d’une enfant encore, qu’il n’en pouvait croire ses yeux. Mais elle ne portait aucune blessure, rien que ce sang figé sur sa jambe. Comment donc l’avait-on tuée ?

Il s’était arrêté tout près d’elle ; et il la regardait, appuyé sur son bâton. Certes, il la connaissait, puisqu’il connaissait tous les