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Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome I.djvu/474

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OBJECTION IIe.

SUR LA SECONDE MÉDITATION.
DE LA NATURE DE L’ESPRIT HUMAIN.

Je suis une chose qui pense : c’est fort bien dit. Car de ce que je pense ou de ce que j’ai une idée, soit en veillant, soit en dormant, l’on infère que je suis pensant : car ces deux choses, je pense et je suis pensant, signifient la même chose. De ce que je suis pensant, il s’ensuit que je suis, parceque ce qui pense n’est pas un rien. Mais où notre auteur ajoute, c’est-à-dire un esprit, une âme, un entendement, une raison : de là naît un doute. Car ce raisonnement ne me semble pas bien déduit, de dire je suis pensant, donc je suis une pensée ; ou bien je suis intelligent, donc je suis un entendement. Car de la même façon je pourrois dire, je suis promenant, donc je suis une promenade.

M. Descartes donc prend la chose intelligente, et l’intellection qui en est l’acte, pour une même chose ; ou du moins il dit que c’est le même que la chose qui entend, et l’entendement, qui est une puissance ou faculté d’une chose intelligente. Néanmoins tous les philosophes distinguent le sujet de ses facultés et de ses actes, c’est-à-dire de ses propriétés et de ses essences ; car c’est autre chose que la chose même qui est, et autre chose que son essence ; il se peut donc faire qu’une chose qui