Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome IV.djvu/187

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corps tellement disposé que le désir et l’espérance ont plus de force à faire aller quantité de sang vers le cœur que la crainte ou le désespoir à l’empêcher.

Art. 173. Comment la hardiesse dépend de l’espérance.

Car il est à remarquer que, bien que l’objet de la hardiesse soit la difficulté, de laquelle suit ordinairement la crainte ou même le désespoir, en sorte que c’est dans les affaires les plus dangereuses et les plus désespérées qu’on emploie le plus de hardiesse et de courage, il est besoin néanmoins qu’on espère ou même qu’on soit assuré que la fin qu’on se propose réussira, pour s’opposer avec vigueur aux difficultés qu’on rencontre. Mais cette fin est différente de cet objet. Car on ne saurait être assuré et désespéré d’une même chose en même temps. Ainsi quand les Décies se jetaient au travers des ennemis et couraient à une (462) mort certaine, l’objet de leur hardiesse était la difficulté de conserver leur vie pendant cette action, pour laquelle difficulté ils n’avaient que du désespoir, car ils étaient certains de mourir ; mais leur fin était d’animer leurs soldats par leur exemple, et de leur faire gagner la victoire, pour laquelle ils avaient de l’espérance ; ou bien aussi leur fin était d’avoir