Page:Œuvres de Descartes, éd. Cousin, tome XI.djvu/256

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la mémoire d’avec celles qui font le vrai sa­vant, distinction qu’il fera aisément.....[1] ; il verra que s’il ignore quelque chose, ce n’est ni faute d’es­prit ni de capacité, et qu’il n’est pas une chose dont un autre possède la connoissance qu’il ne soit capable de connoître comme lui, pourvu qu’il y applique convenablement son attention. Et quoi­qu’on puisse souvent lui présenter des questions dont notre règle lui interdise la recherche, comme il verra qu’elles dépassent la portée de l’esprit hu­main, il ne s’en croira pas pour cela plus ignorant qu’un autre ; mais ce peu qu’il saura, c’est-à-dire que personne ne peut rien savoir sur la question, devra, s’il est sage, satisfaire pleinement sa curiosité.

Or pour ne pas rester dans une incertitude con­tinuelle sur ce que peut notre esprit, et ne pas nous consumer en efforts stériles et malheureux, avant d’aborder la connoissance de chaque chose en particulier, il faut une fois en sa vie s’être de­mandé quelles sont les connoissances que peut atteindre la raison humaine. Pour y réussir, entre deux moyens également faciles, il faut toujours commencer par celui qui est le plus utile.

Cette méthode imite celles des professions mé­caniques, qui n’ont pas besoin du secours des au­tres, mais qui donnent elles-mêmes les moyens de construire les instruments qui leur sont nécessaires.

  1. Il y a ici une lacune.