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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/139

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

l’avenir déjà comme une proche expérience à mener soi-même. Il se révéla soudain très amoureux de Rotrude. Excitée par l’enthousiasme des gens, sa naïve prolixité se promit de conduire le monde avec cette fille de la grande race combattante. Le Maître des Offices, Pierre, lui donna une paonne qu’ils nommèrent Rotrude aussi.

Irène devina qu’il lui siérait bientôt de s’effacer devant le pouvoir de l’empereur devenu l’homme d’État. Son autorité de régente était chose intérimaire, et pis aller de tutelle durant la viduité de la patrie.

Il arriva que cette femme altière se rendît à ce raisonnement vers l’heure même où la combinaison de ses plans aboutissait. Il lui fallut admettre qu’un rôle de vieillesse allait lui convenir dans la retraite du monastère, ou dans les salles du Gynécée. Plus elle ne commanderait ni ne goûterait l’ivresse de sentir lui battre au cœur la faveur publique, de suivre, haletante, le jeu des empereurs où les vies humaines sont les points de dés, et la terre, avec les mers, le plateau d’enjeux.

Constantin avait douze ans. L’extrême jeunesse de l’héritière franque laissait encore du répit.

Irène se vit, à trente ans, près de ne retenir que son titre. Peu lui importait la dignité sans le pouvoir. Cela parut aux eunuques une souveraine injustice du sort. Comment un garçon sot et inexpérimenté saurait-il assumer l’œuvre gigantesque ? Ne croulerait-il pas dans l’ordure de ses vices juvéniles comme ses