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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/228

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

les murs d’argile et de chaux. Les amphores tombèrent des balcons soudain détachés, et se rompirent en morceaux contre les têtes des fuyards, contre les épaules des vieilles glapissantes, au milieu des enfants qui pleuraient, des chiens éperdus, de la poussière en nuages après la chute d’innombrables plâtras. Les chameaux s’évadaient allongeant leurs jambes griffues, leurs mufles mous. Des écuries effondrées, mille chevaux et mulets s’échappèrent, coururent, renversèrent les marchandes, sautèrent les haies, piétinèrent les jardins que jonchaient les arbres s’abattant. Autour des puits des crevasses s’ouvrirent, avalèrent des enfants étourdis et des femmes folles. Les icones s’élancèrent de leurs niches pour frapper les pécheresses. Le sol ondulait comme l’échine du Léviathan que l’on dit réfugié aux profondeurs de l’enfer depuis la mort du Christ. Des familles hurlaient sous les décombres de leurs demeures. Les vantaux arrachés des portes encombrèrent les voies publiques que traversait au galop la panique des coursiers réunis en troupeaux par l’instinct de défense. Maintes ruades tuaient les gens surpris et renversés sur le corps de leurs parents qu’ils secouraient en hâte. La poussière et le vent tourbillonnaient, aveuglaient, bousculaient.

Au Pelagion la mer entre-choqua les navires. Elle brisait les rames. Elle se rua sur les dunettes. Elle emplit les dromons et les chelandia qui sombrèrent par centaines dans la Chrysokeras. Les noyés se débatti-