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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/174

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

servé leurs grandes entrées dans les salons, et que cette ville est de celles où l’on sait encore causer.

Puis, sans transition, il parla des canaux du département ; du canal de jonction de la Loire et de la Seine, dont les deux embranchements se nomment canal d’Orléans et canal du Loing ; et de deux autres canaux, celui de Briare qui joint la haute Loire à la Seine par le canal du Loing et un canal latéral à la Loire depuis Digoin jusqu’à Châtillon-sur-Loire et Briare. M. Pascalet s’étendit ensuite sur la fabrication des lainages à Orléans, et toucha un mot des gourmandises que Pithiviers exporte partout : gâteaux d’amandes et pâtés d’alouettes…

Enfin on arriva aux sources du Loiret. Elles jaillissent dans le parc charmant du château de la Source, à environ une lieue et demie d’Orléans. Ces sources sont le Bouillon et l’Abîme. Avant 1672, l’Abîme, à l’eau profonde et bleue, était le seul jet d’une rivière souterraine provenant évidemment d’infiltrations de la Loire ; la pression intérieure des eaux, ou toute autre cause ayant crevé le plafond de la galerie supérieure, le Bouillon qui est aujourd’hui la source la plus forte, s’échappa tout à coup. Ces sources se trouvent dans un site fort pittoresque entouré d’arbres élevés, tapissé de gazon, et dans le voisinage d’un joli coteau. Du milieu d’un bassin d’environ quarante-cinq pieds de diamètre, on voit l’eau s’élever rapidement d’une grande profondeur, former à la surface un bouillonnement, et se déverser dans un canal qui traverse le parc et longe le château. Les eaux de l’Abîme et du Bouillon réunies forment le Loiret qui est tout de suite navigable. Après un cours de trois lieues il va se jeter dans la Loire.

M. Pascalet affirma que le Loiret était très poissonneux, qu’on y pêchait des brochets et des barbeaux d’un goût exquis, des brèmes, des tanches, des anguilles, et des ablettes, — ce petit poisson dont l’écaille argentée sert à la fabrication des perles fausses. Cette abondance de poisson, observa-t-il, n’a pas peu contribué à attirer sur les rives de ce joli cours d’eau les guinguettes et autres établissements champêtres où l’on combine les délices d’une matelote arrosée d’un vin du cru, avec des concerts sur l’eau, le soir, à l’illumination des feux de Bengale.

Lorsque Modeste et Jean eurent longuement admiré les sources et le paysage, — le pauvre M. Pascalet voyait surtout avec les yeux du souvenir — on parla du retour, et on reprit le bateau. L’homme de lettres voulut que ses jeunes amis choisissent un restaurant où l’on mangerait une friture. Un chalet suspendait ses balcons de bois découpé au-dessus de l’eau ; on descendit là.