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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/315

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

historique ; l’œuvre statuaire la plus belle est le mausolée de Louis de Brézé, dont on attribue les sculptures à Jean Goujon et à Jean Cousin ; le tombeau des cardinaux d’Amboise, œuvre de Rouland Leroux, « maître maçon » de la cathédrale, est aussi fort remarquable.

Mais il fallait se hâter : Barbillon, en digne neveu de sa tante Pelloquet, tint encore à faire voir à son camarade le palais de justice, que Jean considéra comme l’un des plus beaux monuments de la ville. C’est en effet un bien remarquable produit de l’architecture gothique et de la Renaissance. Le palais de justice se compose d’un bâtiment principal et de deux ailes en retour d’équerre. L’architecture du quinzième siècle n’a rien donné de plus riche ni de plus achevé que l’ornementation de la façade, dont le milieu est occupé par une très jolie tourelle octogonale qui divise cette façade en deux parties. Les piliers angulaires des trumeaux, chargés de dais, de clochetons, de statues, les délicates sculptures des fenêtres, l’élégante balustrade de plomb qui termine le toit, la belle suite d’arcades régnant en forme de galerie sur toute la longueur de l’entablement, multiplient les perfections de cet édifice. Jean et son ami se firent montrer la vaste salle des Procureurs, dont la voûte semblable à la carcasse d’un navire renversé est d’une remarquable hardiesse…

On ne s’étonnera pas que la journée tout entière se fût écoulée dans cette visite, même si rapide, du chef-lieu de la Seine-Inférieure. Barbillon conduisit l’ami Jean chez sa tante où il fut gardé jusqu’au lendemain, dame Pelloquet trouvant que son « neveu ne pouvait que gagner aux bonnes manières » de ce vrai Parisien, pour qui le canotage n’était pas l’idéal suprême.

Les deux jeunes garçons avaient décidé d’aller ensemble à Quatre-Mares. La tante de Barbillon à qui Jean plut, autant peut-être par sa modestie et sa raison précoce que par sa belle montre à chaîne d’or, les laissa partir, invitant son neveu à se régler en tout sur les « bonnes manières » de son camarade.

Les voilà donc en route. Ils se rendirent à l’Asile par le faubourg Saint-Sever. Comme ils approchaient de Quatre-Mares, l’attention de Jean fut attirée par un individu d’étrange allure qui, marchant presque à reculons, comme pour se dérober tout en observant s’il n’était pas suivi, prenait la route de Petit-Couronne, laquelle passe entre la Seine et la forêt de Rouvray, le long du chemin de fer. Il avait jeté sa vareuse sur son épaule gauche.

— Que regardes-tu ? lui dit Barbillon.