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VI

À travers la Normandie

Le cabriolet qui s’avançait traîné rapidement par deux jolis poneys brun-roux était conduit par le docteur lui-même, qui venait de Brionne et s’en allait au Bec faire ses visites. En voyant les deux jeunes garçons, défaits et souillés de poussière, Barbillon tout saignant, le docteur arrêta son attelage, et sauta vivement à terre.

C’était un homme jeune, de taille moyenne, bien portant, haut en couleur, rond de manières. Doux et ferme à la fois, un peu brusque même, comme il convient avec une clientèle villageoise, son abord lui gagnait tout de suite la confiance de ses malades. Il alla droit à Barbillon.

— Vous n’êtes pas du pays, mon garçon, lui dit-il ; comment vous trouvez vous dans cet état, sur cette route ? Vous ne vous êtes pas battu avec votre camarade ? non ? Voyons votre front.

— C’est un Allemand, dit Jean, qui nous a arrangés de cette façon. De plus, il m’a pris ma montre et mon argent.

— Un Allemand ? Pitoiset, allez donc me chercher un peu d’eau pour laver cette blessure…

— Avec plaisir, monsieur Ducosté, répondit le garde champêtre en s’éloignant.

— Un Allemand que nous avons suivi depuis Rouen, un méchant homme avec qui j’ai eu déjà plusieurs démêlés.

— Donc, assassinat et vol : hé, hé ! c’est une grosse affaire !

Tandis que le docteur essuyait le front du blessé avec un peu de charpie qu’il était allé prendre dans le coffre de sa voiture, Jean lui raconta ce qui