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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/458

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Parisien en porte balle, Jean fit part à ce dernier de ses impressions de voyage à travers la Flandre, l’Artois et la Picardie. Il lui parla sans colère de son parent Jacob ; mais sur la petite Cydalise il se tut, comme toujours, sachant parfaitement combien il agissait mal envers la famille de cette pauvre enfant.

Il parut à l’artiste que la vie active menée par Jean lui faisait surmonter un peu ce noir chagrin qui le minait naguère ; mais en causant, en allant au fond des choses, Modeste Vidal trouva son jeune ami dans les mêmes dispositions d’esprit qu’au lendemain de la perte de ses espérances. Il demeurait « sans nom, » se faisant inscrire partout en ne donnant que son prénom de Jean, et de même pour la réception de ses ballots de livres. Le musicien comprit que le moment n’était pas encore venu de voir Jean plus raisonnable, — apaisé.

— Alors tu voulais aller à Saint-Quentin ? lui dit-il ?

— Je vais là comme j’irais ailleurs.

— S’il en est ainsi, je t’emmène à Laon avec moi, par le chemin de fer.

Jean accepta — mais avec trop d’indifférence suivant le généreux artiste qui chercha un moyen de stimuler son énergie.

— Tu as vu de grandes villes et de curieuses choses, lui dit-il ; mais en faisant des zigzags à travers ces pays-ci, — où j’aurais pu te rencontrer plus tôt — j’ai fait une découverte ; j’ai presque constaté un miracle ; aussi bien s’agit-il d’une sainte et héroïque fille…

— Qui donc ?

— Jeanne, la libératrice d’Orléans, prisonnière devant Compiègne, martyrisée à Rouen. Je te raconterais volontiers cela… si je ne te connaissais tant et tant d’ennuis !…

— Oh ! vous vous trompez, si vous me croyez indifférent… surtout quand il s’agit de ma petite sœur de Lorraine.

— Vrai ? Eh bien ! alors, je vais te dire ce que j’ai appris dans un village perdu de la Picardie.