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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/496

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XX

Sylvia

Jean et Vidal passèrent une journée entière à Troyes, la seule grande ville du département de l’Aube. L’ancienne capitale de la Champagne, le chef-lieu actuel du département méritait bien cette part d’attention. Bâtie sur la rive gauche de la Seine, au milieu d’une plaine coupée par des ruisseaux et des marais boisés, Troyes présente une population de plus de 38,000 habitants, population industrieuse, remarquable par son goût du travail, ses aptitudes commerciales, une intelligence fort nette de ses intérêts s’alliant très bien avec un grand fonds de bonté et de douceur de caractère.

Les Champenois ont de très sérieuses qualités et un esprit qui ne le cède en finesse aux habitants d’aucune autre province. Le proverbe : Quatre-vingt-dix-neuf moutons et un Champenois font cent bêtes a dû être formulé en Champagne même, par quelque esprit chagrin, — à moins qu’il n’ait rapport à une mesure fiscale que l’on fait remonter au temps de la conquête romaine et qui atteignait les troupeaux de cent bêtes : pour s’y dérober, les cultivateurs formaient leurs troupeaux par fractions de moins de cent têtes de bétail, si bien que César informé de la ruse aurait décidé que le berger comptait, — ce qui ne manquait point d’esprit. Rendons à César l’honneur qui lui est dû, mais rendons aussi justice aux Champenois ; parmi eux on compte des hommes tels que nos historiens Villehardouin et Joinville, le peintre Mignard, le sculpteur Girardon, la Fontaine, Colbert, Turenne et Macdonald, le baron Thénard, l’un des premiers chimistes de ce siècle, le poète Boursault, le conventionnel Danton, Mabillon, Royer-Collard, Chaix-d’Est-Ange et bien d’autres.