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Page:Annales du Musée Guimet, tome 2.djvu/83

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LA MÉTRIQUE DE BHARATA

Que Bharata, du reste, ait suivi ce qu’on pourrait appeler la coutume littéraire du genre dans la rédaction de cette partie de son ouvrage, c’est ce qui semble ressortir aussi de la méthode à laquelle il a recours : dans un traité de métrique spécialement consacré, il a soin de le dire, aux vers en usage dans la poésie dramatique, il fait consister presque exclusivement ses exemples en madrigaux ou on descriptions ayant un sens absolu et ne paraissant se rattacher à aucun titre à une pièce de théâtre quelconque. Il paraît bien certain qu’en ceci l’usage l’a emporté sur la logique et que notre auteur a cru devoir se conformer à l’habitude de ses devanciers au lieu d’employer la méthode si naturelle, mais insolite sans doute, de prendre ses exemples dans le genre littéraire même dont son but principal était de tracer les règles.

Une dernière remarque à faire, c’est qu’un assez grand nombre de mètres portent dans Bharata un nom différent de celui qui leur est donné par toute la série d’auteurs sanscrits publiés jusqu’ici qui ont traité de la métrique. On ne voit pas non plus que ces auteurs, quoique postérieurs à lui (abstraction faite de Piṅgala), l’aient jamais cité. Si l’on rapproche cette double circonstance d’un fait diamétralement opposé, à savoir, de la multiplicité des passages empruntés à Bharata qu’on rencontre dans les traités de rhétorique et les commentaires sur les drames, il convient, ce semble, d’en conclure que, placé en ce qui concerne la métrique sur un terrain un peu différent du sien, le législateur du théâtre hindou n’a pas obtenu à cet égard l’autorité qui lui est si complètement acquise en ce qui regarde la composition dramatique et l’analyse des sentiments qu’on doit mettre en œuvre sur la scène.

Je ne saurais mieux terminer ces rapides observations sur la Métrique de Bharata qu’en constatant les précieux, les indispensables secours que j’ai trouvés pour l’éditer et la traduire dans le mémoire de Colebrooke sur la Poésie sanskrite et prâkrite et dans le beau traité de M. Weber sur la métrique sanskrite, qui remplit le huitième volume des Indische Studien. L’éloge de ces savants travaux n’est plus à faire ; mais quand on a eu comme moi l’occasion d’en tirer si largement profit, ce n’est que justice d’en affirmer à son tour l’excellence.