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LALITA VISTARA. — CHAPITRE XV

les êtres qui sont dans une mauvaise voie, apaises et dans le bien-être, ne sont plus sujets à la corruption naturelle. Des fleurs tombent en pluie, des millions d’instruments de musique résonnent ; Dieux et Asouras (le) louent. Tous, après avoir tourné trois fois en présentant la droite, vont à la ville excellente, remplis de joie.

84. La divinité principale de la ville excellente, l’esprit abattu, s’étant approchée au moment où le grand homme s’avance, et se tenant devant lui, l’esprit abattu par le chagrin, parle ainsi à celui qui a le visage pareil au lotus :

85. Elle est remplie de ténèbres, cette terre ainsi que cette ville ; nue, elle ne brille plus, privée de toi ! Il n’y a plus ici, pour moi, ni joie ni plaisir, puisque ce séjour est abandonné par toi !

86. Tu n’entendras plus, dans l’appartement intérieur rempli de troupes d’oiseaux, les chants et les doux accords des flûtes, ces chants et ces paroles de bénédiction qui t’éveillaient, ô toi, dont la splendeur est infinie !

87. Tu ne verras plus les troupes des Souras et des Siddhas te rendant hommage nuit et jour ; tu ne sentiras plus de parfum divin quand tu seras parti, destructeur de la foule des corruptions.

88. Comme la guirlande détachée quand elle est fanée est abandonnée, lu fais de même aujourd’hui pour cette demeure ; cela me semble comme la vue de la danse sur un théâtre ; toi parti, il n’y a plus ni splendeur, ni bonheur.

89. L’éclat et la force, tu les enlèves à la ville entière qui ne brille plus, pareille à un désert. Elle est devenue fausse aujourd’hui la prédiction des Richis qui annonçaient que tu serais un Tchakrabala.

90. Elle n’est plus une force sur cotte terre la force des Çâkyas ; la race est éteinte ici dans la famille du roi, l’espérance est détruite ici chez la foule des Çâkyas, toi parti, grand arbre de vertu.

91. Moi aussi, je ferai route avec toi, puisque tu pars, ô sans tache, ô exempt de toute tache ! Encore une fois, cédant à l’amour et au regret, regarde ce palais qui est le tien !

92. Et regardant encore le palais, le sage, d’une voix douce, prononça ces mots : Je ne rentrerai pas dans la ville de Kapila sans avoir obtenu ce qui met fin à la naissance et à la mort !

93. Quand elle est immobile, couchée, et appesantie par le sommeil, la ville de Kapilavastou, je ne me tournerai pas vers elle ; tant que n’aura pas été obtenue par moi la condition suprême de l’Intelligence, où il n’y a plus ni vieillesse, ni mort !

94. Lorsque sortait ce Bôdhisattva, seigneur du monde ; tandis qu’il s’en allait à travers le ciel, les Apsaras faisaient entendre ses louanges : Celui-ci est digne de grandes offrandes ! Celui-ci est le grand arbre de vertu, le champ de ceux qui aspirent à la vertu, le dispensateur du fruit de l’immortalité !

95. Celui-ci, pendant plusieurs dizaines de millions de kalpas, par l’aumône, l’empire sur lui-même, la douceur, a complètement obtenu l’Intelligence, car il a de la compassion pour les êtres. Il a une conduite parfaitement pure, il est fidèle à ses vœux, il ne se conduit pas d’une manière inégale, il ne s’intéresse ni au désir ni à la jouissance, il garde la bonne conduite !