Page:Anonyme - La goélette mystérieuse ou Les prouesses d'un policier de seize ans, 1886.djvu/84

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Mais, M. Ralph Turner avait été si préoccupé de la poursuite de Mme d’Hervart qu’il avait négligé de remarquer qu’il était lui-même filé, par deux individus, l’un âgé de seize ans environ, l’autre entre deux âges, avec une barbe légèrement grisonnante et une pipe d’écume de mer. En effet, Joe se dirigeait précisément vers l’hôtel Richelieu, avec son oncle, auquel il croyait le moment venu de faire faire connaissance avec M. Harrison, lorsqu’il avait reconnu M. Ralph Turner. Vivement intéressé par le manège auquel il voyait M. Turner se livrer, à la suite de cette dame inconnue, Joe avait tout de suite flairé quelque découverte importante ; et il n’avait pas hésité à remettre sa visite a un autre moment, pour s’attacher aux pas de l’ennemi de M. Robert Halt.

— Je crois que nous touchons à l’instant décisif, dit joyeusement le gamin, en s’adressant à son oncle. Si une petite promenade ne vous était pas désagréable, nous nous laisserions guider par ce gentleman, qui suit une dame. Il y a quelque chose qui me dit que notre course sera largement récompensée.

— Qui est-ce ? demanda Lafortune, tout en cédant aux désirs du gamin.

— C’est la plus belle pièce de gibier que vous ayiez encore chassée, mon oncle : un gibier que j’ai eu joliment du mal à détourner : vous saurez cela avant la fin du jour ; mais patience ; la fin de la chasse est proche et nous serons joliment payés de nos peines

Arrivés devant l’hôtel Windsor, nos deux amis se distribuèrent les rôles. Lafortune resta à surveiller la porte, pendant que Joe pénétrait dans le hall, sous un-prétexte quelconque, et trouvait même le moyen de se présenter au bureau du télégraphe, pendant que M. Turner y faisait enregistrer ses nombreuses dépêches.

— Tout va bien, fit Joe en riant silencieusement, après avoir jeté sur les dépêches un rapide regard. L’ennemi se jette de lui-même dans la gueule du loup. Peut-être bien, M. Turner se serait-il moins pressé d’envoyer cette dépêche, s’il avait seulement eu le temps de savoir ce qui s’est passé hier entre M. « Cheveuxroux » et moi, aux environs de Sorel.

Et Joe aurait pu ajouter que, sans cette dépêche dont les termes impliquaient l’urgente nécessité d’un retour immé-