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Page:Anthologie de la littérature ukrainienne jusqu'au milieu du XIXe siècle.djvu/129

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Ne serait-ce même qu’un germe de malheur
Qui aurait anéanti leur paradis ?

Je ne sais pourquoi et par suite de quoi
Nos vieux sont tristes. Il se peut que déjà
Ils s’apprêtent à passer à Dieu
Et que quelqu’un pour ce long voyage
Attèle déjà de bons chevaux ?
« Et qui nous enterrera, Nastia,
Quand nous mourrons ? »
Quand nous mourrons ? » « Je ne le sais pas, moi !
J’y ai bien réfléchi,
Et j’en suis toute attristée :
Nous avons vieilli tout seuls…
À qui laisserons-nous
Notre bien ? »
Notre bien ? » — « Tiens !
N’entends-tu pas ? On pleure
Devant la porte… comme un enfant !
Courons-y, vois-tu,
J’avais un pressentiment qu’il arriverait quelque chose. »

À la fois ils se précipitèrent
Vers la porte. Ils courent
Sans parler et s’arrêtent :
Là, devant le seuil
Un enfant emmailloté
Un peu lâchement et recouvert
D’un manteau neuf ;
Car la mère l’avait enveloppé
Et pendant l’été elle le couvrait
De son dernier manteau !

Ils s’étonnèrent, ils prièrent,
Nos vieux. Et gentiment,
Comme pour supplier,
L’enfant levait ses petits poings
Et vers eux tendait
Ses menottes… Il se tut.
Comme pour ne pas crier
Il geignait doucement.

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