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trouver refuge avec nos supplications si ce n’est en Toi, Monarque Très Auguste ? Tu es notre protecteur et le garant de notre bien-être. Mais la méchanceté de Tes favoris[1], nos ennemis irréconciliables et rancuniers, T’a écarté du droit chemin et a avili ton règne. Jeter les nations dans l’esclavage et régner sur des serfs et des esclaves est le fait d’un tyran asiatique, mais non d’un monarque chrétien, qui doit s’acquérir de la gloire et être réellement le père commun de ses peuples.

Je sais que les fers et de sombres prisons nous attendent, où l’on nous fera périr par la faim et les tourments, suivant l’habitude moscovite, mais, tant que Je suis encore en vie je Te dis la vérité, Sire : Tu auras à rendre compte devant le Tzar de tous les Tzars, devant Dieu Tout-puissant, d’avoir fait périr notre nation entière.

Jean Kotlarevsky :

L’Énéide travestie.

L’Énéide travestie eut un tel succès parmi « les amateurs de la langue petite-russienne », lors de son apparition en 1798 à Pétersbourg, qu’elle fit époque et l’on se prit à la considérer comme la première œuvre de la nouvelle littérature ukrainienne. Cependant, quoique elle ait eu une grande influence sur les écrivains postérieurs, elle appartient encore, tant par sa date que par son style pseudoclassique, aux « plaisanteries » du xviiie siècle. Il n’en est pas de même de Natalka de Poltava, l’autre œuvre remarquable de Kotlarevsky, qui tient une place d’honneur dans la nouvelle littérature romantique.

L’Enfer.

Énée descendant aux Enfers
Se trouva transporté dans un autre monde.
Là tout pâlit et se décolore,
Plus de lune, point d’étoiles,
Seulement de grandes ténèbres.
On y entend des cris plaintifs,
Car les tourments des pécheurs n’y sont pas petits.
Énée et la Sibylle regardaient
Les tourments qu’on leur faisait souffrir
Et le genre de peine qu’on infligeait à un chacun…

Là, dans l’enfer, la poix bouillait
Et mijotait dans des marmites,

  1. Menchikof.
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