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Page:Auclert - Les Femmes arabes en Algérie, 1900.pdf/203

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venant s’abattre en plein Alger. Quelques compagnies arrivèrent d’abord en éclaireuses (ce sont les mâles qui marchent les premiers), puis ce ne furent plus des compagnies de sauterelles qui se montrèrent, mais le tourbillonnement incessant d’une armée de scarabées d’or étincelant sous le soleil, dans le ciel bleu, ressemblant — couleur à part — au tourbillonnement des flocons de neige, par leur nombre et leur rapidité.

Dans leur vol vertigineux, ces flocons d’or vivants sont superposés ; les uns touchent aux nues ; les autres rasent la terre. Les sauterelles laissent en passant tomber les preuves de leur digestion ; terrasses et balcons sont, après chaque vol, maculés. Elles-mêmes ne dédaignent pas de s’abattre sur les fleurs et la verdure ; elles tombent nombreuses par les cheminées.

Cette invasion des sauterelles qui fait l’amusement des citadins d’Alger, le désespoir des colons et des indigènes et est pour tout le monde la famine en perspective, offre un spectacle curieux ; on oublie le boire et le manger pour regarder les vols ; enfants et grandes personnes saisissent au passage ces bestioles, on se les renvoie en riant ; on dirait de cette calamité une fête.

On fait des chapelets de sauterelles, on en met sous globe ; chacun est jaloux d’essayer dans un