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Page:Baillet - La Vie de monsieur Des-Cartes, première partie.djvu/342

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extraordinaire une inclination trés-violente à le servir ; et il s’étoit rendu son correspondant en Hollande pour les lettres et les pacquets qui s’addressoient de France, d’Angleterre, et des Pays-Bas à ce philosophe, et pour une grande partie de ce qu’il avoit à envoyer en divers pays.

Les services et la bienveillance dont il étoit redevable à un tel amy luy ôtoient donc la liberté de lui rien refuser de ce qui dépendoit de lui : et ce fut pour luy obéir qu’il écrivit son petit traité des méchaniques vers la fin de l’hyver, qui commença l’année 1636. M De Zuytlichem l’avoit surpris dans un têms où il étoit le moins en disposition de travailler à des matiéres de cette nature : mais il fallut faire violence à son humeur. On peut dire qu’il brocha ce petit traité plûtôt qu’il ne le composa ; et il prit à la lettre l’intention de son amy, qui ne luy en demandoit que trois petits feüillets . Il ne se hâta point de le luy envoyer le voyant occupé au camp devant le fort de Skein, que le Prince D’Orange avoit envie de reprendre sur les espagnols, qui s’en étoient rendus les maîtres la nuit du 16 de Juillet de l’année précédente. La place se rendit au prince le dernier jour d’avril aprés un siége de prés de huit mois : mais M De Zuytlichem qui resta pendant quelque têms sur les lieux pour faire rétablir et fortifier cette importante place ne fut de retour à La Haye que vers le milieu du mois de juin.

M Descartes qui par la fidélité et l’exactitude de ses correspondans se trouvoit à Lieuwarden aussi commodément que dans Amsterdam pour le commerce des lettres, recevoit beaucoup de satisfaction des nouvelles qu’il apprenoit de ses amis. Ceux qu’il avoit à Paris étoient des plus ardens à le presser sur la publication de sa philosophie ; et leurs importunitez le rappellérent enfin à Amsterdam vers le commencement du mois de Mars, pour délibérer de plus prés avec eux sur leurs demandes. Il fit une observation en venant de Frise, dont il crut devoir faire part à un de ses amis de Leyde, qui l’avoit convié à son arrivée de prendre un logement chez luy.

Etant de nuit sur le Zuyder-Zée pour passer de Frise à Amsterdam, il s’étoit tenu le soir assez long-têms la tête appuyée sur la main droite, dont il fermoit l’œil droit tandis que l’autre demeuroit ouvert. L’air étant assez obscur