Page:Barine - Névrosés : Hoffmann, Quincey, Edgar Poe, G. de Nerval.djvu/284

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en un mot, une moisson de promesses. À la vérité, la rime était pauvre et le style poncif ; mais on n’avait pas le droit d’être trop exigeant envers un écolier que ses leçons réduisaient, selon ses propres expressions, à donner « un essor rapide » à


Ces chants que produisit un trop rare loisir.


Les publications de 1826 comprenaient aussi une comédie en vers, d’une telle hardiesse dans le texte primitif, assurait la préface, que l’éditeur effrayé avait exigé de nombreux remaniements. Sous sa forme adoucie, la pièce gardait de quoi mettre en joie une classe travaillée par le romantisme et comptant Théophile Gautier sur ses bancs. Elle était dirigée contre l’Académie française, qui avait eu l’injustice et l’imprudence de ne pas couronner un mémoire de l’auteur sur la poésie au XVIe siècle. On y voyait l’un des « incurables » du palais Mazarin demander au Pauvre du pont des Arts de consentir à poser sa candidature à l’Académie. Le Pauvre voulait savoir à quoi il s’engageait, avant de donner une réponse, et en quoi consiste le métier d’académicien. Son interlocuteur le lui expliquait en ces termes :


  Donner la chasse aux gens
Qui pour titre au fauteuil n’ont rien que des talents ;
Flatter les grands seigneurs, faire honneur à leur table.
Les égayer, leur plaire et leur paraître aimable ;
Des jésuites vainqueurs soutenir les tréteaux,
Les prôner à toute heure et baiser leurs ergots ;
Des idoles du jour imiter les grimaces,…
Moyennant quoi, l’on a des dîners et des places.


— Ça ne me va pas ! répondait en substance le Pauvre du pont des Arts, dans une tirade dont la chute est sanglante pour l’Académie :


    … Car j’ai de la décence ;
Dans mon petit état, j’aime l’indépendance