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Page:Barine - Névrosés : Hoffmann, Quincey, Edgar Poe, G. de Nerval.djvu/361

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donc de savoir à qui j’ai donné ce rude soufflet, vous savez bien, une nuit à la Halle… Faites mes excuses à ce malheureux quidam. Je lui offrirais bien une réparation, mais j’ai pour principe qu’il ne faut pas se battre quand on a tort, surtout avec un inconnu nocturne. Autrement vous croiriez que je fais le Gascon sur la lisière de l’Allemagne ; mais, franchement, j’étais plus malade que je ne croyais, le jour ou plutôt la nuit de cet exploit ridicule. » Étant mieux, il voulait bien convenir qu’il avait eu la cervelle troublée, mais il n’en convint pas longtemps.

Il est question dans la même lettre d’une troisième oraison funèbre : la biographie d’Eugène de Mirecourt, qui lui avait été particulièrement insupportable à cause du portrait placé en tête : « Dites donc, je tremble ici de rencontrer aux étalages un certain portrait pour lequel on m’a fait poser, lorsque j’étais malade, sous prétexte de biographie nécrologique. L’artiste est un homme de talent,… mais il fait trop vrai ! — Dites partout que c’est un portrait ressemblant, mais posthume, ou bien encore que Mercure avait pris les traits de Sosie et posé à ma place. Je veux me débarbouiller avec de l’ambroisie, si les dieux m’en accordent un demi-verre seulement. » Ce portrait, si amer à sa coquetterie, est justement le seul connu, sinon le seul existant ; il a été reproduit partout. Gérard de Nerval y est représenté de face, le menton sur sa main, le coude sur sa table de travail. Il a les joues rondes, les traits placides et comme émoussés, le buste affaissé et inélégant ; sans son regard de fou, luisant et indigné, il serait d’une complète insignifiance.

À son père : « (Ce 4 juin 1854.) Je t’écris de Strasbourg… Ma foi, on avait raison de me prescrire les ménagements. Le mal, c’est-à-dire l’exaltation, est revenu parfois, c’est-à-dire dans de certaines heures.