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Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/108

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LA COLLINE INSPIRÉE

dire, en patois, la meilleure. Elles travaillent pour que leur maître soit satisfait quand il reviendra. Elles dépensent de l’amour à poursuivre la moindre poussière dans les recoins des immenses corridors, et ne posent le balai que pour saisir la bêche et le râteau ; puis toutes, elles abandonnent bêches, râteaux et balais pour prendre le fil et l’aiguille et repriser les chasubles et les nappes de l’autel. Mais c’est en vain que le cœur de ces femmes cherche son repos dans les longues habitudes rurales et ménagères de leur race, l’inquiétude les ronge.

La vie matérielle est dure dans les campagnes, et la vie de l’âme presque absente. Dès que l’on construit une arche, il y vient à tire-d’ailes, de tous les environs, des êtres plus faibles ou plus délicats. Les jeunes paysannes accourues dans les abris de Léopold étaient naturellement de l’espèce qui a peur de la vie et de ses efforts, et qui désire vivre comme des enfants à qui Dieu donne la pâture ; mais les plus faibles, les plus dépourvues, on peut croire, étaient celles-là qui, l’heure venue de l’éparpillement, n’avaient pas osé prendre leur vol et s’étaient rapprochées de leur Supérieur avec plus de confiance. Qu’elles sont aujourd’hui désorientées, mal à l’aise ! Privées