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Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/303

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contre ses collègues émut d’un profond bonheur Léopold.

— Mademoiselle Marie, dit-il, c’est la Providence qui me met en face de vous dès mon retour dans le pays. De grandes choses vont arriver. Bientôt, je vous rachèterai Sion au meilleur prix.

La Noire Marie poussa un profond soupir, et invita honnêtement Léopold à se reposer un instant chez elle.

La chambre était démeublée, mais encombrée d’une quantité de provisions. Ils s’assirent l’un en face de l’autre, sur des sacs de pommes de terre.

Quand le vieil homme se vit dans la chambre de Thérèse, devenue l’antre d’une sorcière, il fut pris d’une sorte d’enthousiasme :

— Je suis Léopold Baillard, disait-il, et je reviens d’exil pour relever la gloire de Sion.

D’une voix douce, sans une hésitation, avec une parfaite platitude de termes, mais avec l’autorité du visionnaire qui décrit ses idées fixes, il annonça que l’Année Noire était proche. On en serait averti par l’apparition de flammes dans le ciel, que mieux que personne, depuis ses fenêtres, la Noire Marie était bien placée pour voir venir.

— Le couvent sera peut-être détruit, disait--