Page:Barrès - La Colline inspirée, 1913.djvu/349

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Personne ne fit opposition. Seule, une pensée inexprimable, où se mêlaient la vénération et la nostalgie et puis la haine contre l’étranger, se formait, sorte de romance sans paroles, du ton le plus grave, au fond de la conscience sacerdotale du vieil amant de la colline. Ils ne reviendront jamais, les siècles de jadis, mais ils sont blottis, tout fatigués et dénaturés contre nos âmes, et que dans un cri, dans un mot, dans un chant sacré, ils se lèvent d’un cœur sonore, tous les cœurs en seraient bouleversés.

Ce même jour, après le souper, les Oblats se promenant sur la terrasse, par cette belle soirée d’été, aperçurent une forme qui longuement errait autour de la cachette violée. Ils se penchèrent et reconnurent Léopold il était là, seul avec l’esprit de la solitude, et ils cherchèrent à deviner la nature de l’attrait et du sortilège qui retenait le réprouvé auprès de cette fosse.

Léopold songeait à l’ensevelisseur de l’idole. Quel était-il, le fidèle qui, jadis, à l’heure où la foi nouvelle, avec des cris menaçants, escaladait la colline, saisit et coucha son Dieu dans ce trou ? Avec l’image divine, ce pieux serviteur enterrait des pensées, des sentiments, toute une humanité. La nuit enveloppe ce