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Page:Bashkirtseff - Journal, 1890, tome 1.pdf/228

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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

— Oh ! oui.

— Qu’a-t-il ?

— Il a mal aux jambes, il a la goutte, et hier… non, avant-hier il a eu un terrible accès. Il a la décomposition du sang, je ne peux pas dire cela à une dame…

— Et c’est inutile.

— Ne vous agitez pas, dit-il. Vous me fatiguez. Pensez doucement, je ne peux pas vous suivre…

Sa main tremblait et faisait tout trembler en moi ; je la lâchai et devins calme.

— Prenez cela, lui dis-je, lui donnant la lettre de Pietro cachetée dans une enveloppe exactement semblable à l’autre.

Il la prit, et, comme l’autre, la pressa contre son cœur et son front.

— Tiens, fit-il, celui-là est plus jeune, il est très jeune, Cette lettre est écrite depuis quelque temps déjà ; elle a été écrite à Rome et, depuis, cette personne s’est déplacée… Elle est toujours en Italie… mais ce n’est pas à Rome… Il y a la mer… Cet homme est à la campagne… en pleine campagne. Oh ! certainement il s’est déplacé depuis hier, depuis vingt-quatre heures seulement, pas davantage… Mais cet homme est quelque chose au Pape, je le vois derrière le Pape… Il est lié à A…, il a un lien de parenté proche avec lui.

— Mais quel est son caractère, quelles sont ses inclinations, ses pensées ?

— C’est un caractère étrange… renfermé, sombre, ambitieux… Il pense à vous constamment… mais il pense surtout à arriver à son but… Il est ambitieux.

— Il m’aime ?

— Beaucoup ; mais c’est une nature étrange, malheureuse. Il est ambitieux.