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DE MARIE BASHKIRTSEFF.

Cet appel m’a soulevé l’âme. Pourquoi ne va-t-on pas demander à l’Empereur la guerre ? Si toute la nation, se soulevant, venait tomber aux genoux, de : l’Empereur en le priant d’aller au secours de ses frères livrés à la fureur des sauvages, qui oserait dire non ?

Mais les nihilistes, voilà le malheur. Une fois les troupes éloignées, ils soulèveraient tout ce qu’il y a de forçats et de vauriens et feraient une petite Commune pour commencer.

Voyez-vous, être là, dans le cœur de son pays si beau et qui donne tant d’espérance, et se sentir menacé de toutes ces horreurs !…Je voudrais le prendre dans mes bras et l’emporter au loin, comme un enfant auquel on ferme leş yeux et bouche les oreilles pour qu’il n’entende pas les blasphèmes et ne voie pas les saletés.

Dieu ! comment ai-je pu l’embrasser sur la figure ? moi, la première ? Folle, exécrable créature ! Ah ! voilà qui me fait pleurer et frissonner de rage ! Turpis, execrabilis !

Il a cru que c’était tout simple pour moi, que ce n’était pas la première fois, que c’était une habitude prise ! Vatican et Kremlin ! j’étouffe de rage et de honte !

Une tasse de consommé, un calatch chaud et du caviar frais, voilà un commencement de dîner incom-