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Page:Beecher Stowe - La Case de l’oncle Tom, Sw Belloc, 1878.djvu/205

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s’arrêter pour donner un biscuit à Henri, le caresser, rouler sur ses doigts blancs les longs cheveux noirs et bouclés de l’enfant. Elle vit Rachel, la digne et vénérée matrone, s’approcher de temps en temps du lit pour relever l’oreiller, arranger les draps, et d’une façon ou d’une autre épancher sa bienveillance ; il lui semblait que, de ces grands yeux bruns et limpides, un rayon de soleil descendait sur elle, et lui réchauffait le cœur. Elle vit entrer le mari de Ruth ; — elle vit la jeune femme courir à lui, et lui parler tout bas avec vivacité, en montrant d’un geste expressif la chambre à coucher. Elle la vit assise avec son poupon dans ses bras. Elle les vit tous à table, et le petit Henri hissé sur une grande chaise, et abrité sous les larges ailes de Rachel Halliday. Un doux murmure de causeries, un petit cliquetis de cuillères, le bruit harmonieux des tasses et des soucoupes, tout se fondit en une rêverie délicieuse, et Éliza dormit, comme elle n’avait pas dormi depuis l’heure terrible où elle avait pris son enfant, et s’était enfuie avec lui, par une nuit étoilée et glaciale.

Elle rêva d’un beau pays, — d’une terre qui lui semblait le séjour du repos, de rives vertes, d’îles riantes, d’eaux qui scintillaient au soleil ; et là, dans une maison, que de douces voix lui disaient être la sienne, elle voyait son enfant jouer, libre et heureux. Elle entendit le pas de son mari ; elle le sentit s’approcher ; il l’entoura de ses bras ; ses larmes inondèrent sa figure. Elle s’éveilla ! Ce n’était pas un rêve ! Le soleil était couché depuis longtemps. Son fils dormait à ses côtés ; une chandelle éclairait obscurément la chambre, et à son chevet sanglotait son mari.




Le lendemain, le jour se leva joyeux sur la maison des quakers. La mère, debout à l’aube, entourée d’actifs garçons et filles, que nous n’avons pas eu le temps de présenter hier au lecteur, et qui tous, obéissant aux affectueux