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Page:Bird - Voyage d’une femme aux Montagnes Rocheuses, 1888.pdf/171

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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

avons traversé la rivière, mais je m’étonnai de sa préférence, car l’eau était assez profonde pour lui venir jusqu’au corps, et d’un froid glacial pour mes pieds. J’ai entendu dire par la suite que ce pont était dangereux. Cette jument est la reine des ponies : très-douce quoique de race sauvage, elle est toujours contente et affamée, ne se fatigue jamais, regarde tout avec intelligence, et a les jambes solides comme du roc. Son seul tour est de se gonfler beaucoup lorsqu’on la selle, de sorte que si on n’y est pas accoutumé, on s’aperçoit bien vite que la sangle est trop lâche. Quand je la selle moi-même, une petite tape sur le flanc, ou quelque petit mouvement pour l’empêcher de retenir son haleine, suffisent pour que tout aille bien. C’est une vraie compagne, et après la course de la journée, mon premier soin est toujours de lui baigner le dos, de lui éponger les naseaux et de veiller à sa nourriture.

J’atteignis enfin une log-cabin où l’on donna à manger à moi et à ma bête, et où je reçus de nouvelles indications. Le reste de la journée fut assez terrible. Il y avait plus de treize pouces de neige, dont l’épaisseur augmentait tandis que je montais dans le silence et la solitude ; mais, juste à l’instant où le soleil disparaissait derrière un pic neigeux, j’atteignis le sommet de la Divide, à 7, 975 pieds au-dessus du niveau de la mer. Là, dans une solitude impossible à décrire, s’étendait un lac glacé. Les hibous criaient dans les pins, le sentier était obscur, le pays inhabité, le mercure marquait neuf degrés au-dessous de zéro, mes pieds. étaient devenus insensibles, et l’un était gelé sur l’étrier de bois. Je m’aperçus qu’à cause de l’épaisseur de la