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Page:Braddon - L’Héritage de Charlotte, 1875, tome I.djvu/226

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L’HÉRITAGE DE CHARLOTTE

aussi intelligente que lui, Diana, et il arrive quelquefois que les auteurs favoris de Valentin sont un peu sévères pour moi. Mais je lutte, et plus le combat est rude, plus j’admire l’intelligence de celui que j’aime. Songez-Diana, trois articles différents dans trois différents magazines, le dernier mois. L’article sur Apollodore, dans le Cheapside, vous savez, et cette histoire dans le Charing-Cross : « Comment j’ai perdu mon parapluie et fait la connaissance de M. Gozzleton… » qui est si amusante ! Et l’inépuisable Traité sur les sources de la lumière, dans la Revue scientifique du Samedi. Songez à toutes ces charges qu’il a faites sur Homère, un vieil aveugle, qui a écrit un long poème sur des batailles, et qui l’a si mal fait, qu’aujourd’hui encore, on ne sait pas si c’est un poème complet ou un ramassis de poésies cousues ensemble par un homme qui a un nom grec que l’on ne peut pas prononcer. Quand je pense à ce qu’a écrit Valentin en comparaison de l’œuvre d’Homère, et le peu d’attention que lui accordent les critiques, si ce n’est pour l’agacer, le déclarant creux et frivole, je commence à penser que la littérature s’en va à tous les diables. »

Et sur ce Charlotte devint toute pensive, absorbée par la contemplation du génie de Haukehurst.

Diana avait commencé la conversation très-habilement, avec l’intention de passer par une adroite transition des amours de Charlotte aux siennes ; mais la conversation avait changé de cours, avait dégénéré en une discussion littéraire. Le jeune écrivain que ses premiers coups d’ailes semblaient porter aussi haut que Pindare, l’aigle sublime de Thèbes, aux yeux de son amante qui suivait son vol dans les cieux, en avait fait les frais.

« Charlotte, dit Mlle Paget après une pause, seriez-