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LA FEMME DU DOCTEUR

prairies, et un homme tenant en main deux chevaux devant la porte de la petite auberge.

— Cet homme avec les chevaux est Jeffson, le jardinier de mon père. Je ne l’appelle pas volontiers domestique, car c’est un parent éloigné de la famille de ma mère, — dit George avec un peu de confusion. Il pensait que peut-être la fierté de Mlle Sleaford pourrait prendre ombrage du lien de parenté qui existait entre son futur mari et son domestique. — C’est un bien brave homme, — continua-t-il. — Et puis, Isabel, voyez un peu, — ajouta le jeune homme à voix basse, — ce pauvre Jeffson est venu de Graybridge ici, dans l’intention de vous voir, parce qu’il m’a entendu parler de votre beauté, et je crois bien qu’il a deviné depuis longtemps mon amour pour vous. Vous est-il égal de faire un pas jusqu’à lui, Isabel, ou préféreriez-vous que je lui fasse signe d’approcher ?

— J’irai vers lui, si vous le voulez bien ; il me sera très-agréable de le voir, — répondit la jeune fille.

Elle prit le bras que George lui offrait. Il était tout naturel qu’elle prît son bras. Tout n’était-il pas arrangé ?

Mlle Sleaford a désiré vous voir, Jeff, — dit le jeune homme lorsqu’ils furent arrivés à l’endroit où se tenait le jardinier.

Le pauvre Jeff ne sut trop que dire en cette occasion au moins embarrassante. Il se découvrit et resta tête nue, souriant et rougissant, pendant que George lui parlait, mais ne quittant pas néanmoins du regard le visage d’Isabel. Il pouvait voir très-distinctement ce jeune et pâle visage à la lumière du soir, car Mlle Sleaford avait laissé son chapeau au cottage et se tenait la tête découverte, tournée vers le couchant,