Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
55
LA FEMME DU DOCTEUR

Sigismund appela la fille de cuisine, et les deux jeunes gens la soumirent à un rigoureux interrogatoire ; mais elle ne put rien leur dire de plus que ce qu’elle leur avait débité tout d’une haleine la première fois.

M. Sleaford a pris son déjeuner à près d’une heure, puisque j’ai fait cuire les pommes de terre pour le dîner des enfants avant de préparer ses œufs. Après cela il est sorti, puis il est revenu dans un hansom à trois heures de l’après-midi, et il a dit à madame de faire les paquets et au cocher du hansom d’envoyer une voiture à quatre places de la première station qu’il trouverait, à six heures précises. Puis on a envoyé la majeure partie des bagages chez la fruitière et le reste a été mis sur la voiture ; et Master Horace est monté à côté du cocher pour fumer un de ces mauvais cigares à un sou qui le rendent toujours malade. Quant à M. Sleaford il n’est pas monté dans la voiture, mais il est parti d’un air aussi tranquille que possible, faisant des moulinets avec sa canne, et redressant la tête aussi fièrement que jamais.

Sigismund demanda à la fille si elle avait entendu l’adresse donnée au cocher.

— Non, — répondit celle-ci ; — M. Sleaford n’a pas donné d’adresse. Il a dit au cocher d’aller au pont de Waterloo ; c’est tout ce que j’ai entendu.

L’étonnement de Smith ne connaissait pas de bornes. Il parcourait en tous sens la maison déserte et les allées du jardin, envahies par les herbes, longtemps après l’apparition de la lune brillante qui découpait nettement le contour des feuilles et des branches sur le sol splendidement éclairé.

— Jamais de ma vie je n’ai vu pareille chose, —