Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/159

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
155
LES OISEAUX DE PROIE

— Qu’entendez-vous par là ? demanda vivement Philippe.

— Je pense que vous pouvez aisément deviner ce que je veux dire, répondit George d’un ton de mauvaise humeur.

— Je ne le puis nullement, et qui plus est, je n’ai pas l’intention de chercher à le faire. À mon tour, je veux vous dire votre fait. Maître George, depuis quelque temps vous me fatiguez de vos allusions et de vos malveillantes insinuations. Il faut que vous me connaissiez bien peu pour ne pas savoir que je suis l’homme du monde le moins disposé à supporter cela de vous ou d’aucun autre. Vous avez essayé de prendre avec moi le ton d’un homme qui sait qu’il a le moyen d’en dominer un autre. Vous auriez dû comprendre que cela ne prendrait pas. Si vous aviez vraiment un moyen de me dominer, il y a longtemps que vous vous en seriez servi. Comment n’avez-vous pas saisi tout de suite que je vois clair dans votre jeu ? »

George regarda son frère avec une expression de surprise qui frisait l’admiration,

« Eh bien ! vous êtes un esprit fort, Philippe ! » dit-il.

La conversation en resta là. À partir de ce moment, les deux frères semblèrent les meilleurs amis du monde, et George vint à la maison gothique toutes les fois qu’on l’y invita à dîner. Les dîners étaient bons et les convives étaient des gens très-bien posés dans leur monde. George ne dédaignait pas les bons dîners en même temps qu’il n’était pas fâché de se rencontrer avec des hommes honorables ; mais il renonça à emprunter de l’argent à son frère.

Il resta autant qu’il put chez lui. Il avait un petit