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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/45

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LES OISEAUX DE PROIE

Les tristes prévisions de Georgy ne l’avaient que trop inspirée. Il était près d’une heure lorsqu’un bruyant double coup de marteau annonça le retour d’Halliday. Le vent soufflait violemment et une pluie battante avait fouetté les vitres pendant la dernière demi-heure. Mme Halliday était près de suffoquer.

« Je suppose qu’il n’aura pas pu trouver de cab, » dit-elle brusquement, au moment où le bruit du marteau retentit.

Car, minuit passé, on a beau attendre une personne d’instant en instant, depuis plusieurs heures, le bruit du battant de la porte qui l’annonce vous surprend toujours.

« Il est revenu à pied avec la pluie et il va sans doute avoir un gros rhume, ajouta-t-elle tristement.

— Alors, il est heureux pour lui d’être dans la maison d’un médecin, » répondit en riant Sheldon.

C’était certainement, nous l’avons dit, un bel homme, mais il riait mal, M. Sheldon.

« J’ai fait toutes mes études médicales, vous le savez, et je suis aussi bien en état de soigner un rhume, une fièvre quelconque, que de fabriquer un râtelier de fausses dents. »

Halliday fit à ce moment irruption dans la chambre, en chantant sur un ton très-faux la ritournelle d’un chœur populaire. Il était très en train, comme on dit, mais il n’était pas ivre.

« Je suis venu à pied seulement depuis Covent Garden, et, en route, je n’ai pris qu’un pot de porter et un welsh-rabbit. J’ai entendu une musique exquise, des chanteurs qui avaient des voix d’anges… et j’ai soupé dans un endroit où les duchesses elles-mêmes ne craignent pas de venir en sortant de leur loge grillée, à ce que m’a dit George. »