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LES OISEAUX DE PROIE

— Non, répondit George d’un air pensif ; Philippe n’est ordinairement pas facile à abattre. »

Le malade dormait en ce moment. George resta quelques minutes auprès du lit à considérer sa figure altérée, puis il se tourna se disposant à quitter la chambre.

« Bonsoir, madame Halliday, dit-il, j’espère que le pauvre vieux Tom sera un peu mieux quand je reviendrai demain.

— Je l’espère, » répondit tristement Georgy.

Elle était assise près de la fenêtre, regardant le ciel qui peu à peu devenait plus sombre. Le soleil se couchait dans des nuages humides, chargés de pluie, orageux, et à la clarté de ses derniers rayons, succéda une sorte de nuit, lourde, grise, qui emplit démesurément l’espace.

Cette figure immobile près de la fenêtre, ce ciel couvert roulant ses tristes nuages, cette chambre presque noire, encombrée de fioles, formaient un tableau lugubre qui demeura longtemps présent aux yeux de celui qui le contemplait alors.

George et Nancy sortirent de la chambre ensemble ; la vieille ménagère portant la tasse de bouillon.

« Il semble être en mauvais chemin, ce soir, Nancy, dit George en faisant de la tête un signe en arrière et en désignant la chambre du malade.

— Il est en mauvais chemin, répondit gravement la vieille femme, quoi qu’en puisse penser M. Philippe. Je n’ai pas l’intention de rien dire contre la science de votre frère ; car un homme aussi travailleur que lui doit certainement être très-savant, et si j’étais malade moi-même je me confierais entièrement à lui. J’ai entendu dire à Barlingford que les avis de mon maître étaient aussi bons que ceux d’un médecin en titre, et qu’il y en avait fort peu de ceux-ci qui en sachent autant que lui ;