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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/78

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LES OISEAUX DE PROIE

interrompu par des bruits de roues et des tintements de cloches, par le claquement des fouets, les jurons sonores des postillons, et l’empressement tumultueux des garçons d’hôtel. C’est seulement alors qu’une sorte d’animation confuse se répand dans la petite ville ; c’est comme une apparition passagère, un trouble momentané de sa quiétude naturelle.

Cependant en somme ce calme n’est qu’apparent. Gagnez la grande maison aux fenêtres hautes et entrez. Quand vous êtes entré, vous vous trouvez nez à nez avec un domestique en livrée ; vous devez lui remettre votre canne, c’est la loi !

Une porte vitrée s’ouvre sur un salon où sont entassés des hommes, des femmes, les uns assis, les autres debout, faisant cercle autour d’une table recouverte d’un tapis vert. Tous ces gens sont là pour jouer ou regarder jouer, et vous, vous êtes dans la salle de jeu.

Ce salon n’est qu’une sorte d’antichambre, un salon de petit jeu.

Une autre porte ouvre sur une seconde salle. Les joueurs y sont presque tous assis ; derrière les chaises d’autres joueurs se promènent. L’on y voit également des femmes, mais en plus petit nombre que dans la pièce d’entrée ; ces femmes sont plus jeunes, plus belles, plus richement habillées que celles qui ne risquent que de la monnaie d’argent.

La plus jeune et la plus jolie de celles qui se trouvaient dans ce salon doré, une après-midi du mois d’août, neuf années après le décès de Tom Halliday, était une jeune fille. Elle se tenait debout derrière la chaise d’un Anglais qui avait l’air militaire : un assez bel homme, d’un certain âge, à la figure fatiguée, comme celle des viveurs.