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Page:Braddon - Les Oiseaux de proie, 1874, tome I.djvu/83

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LES OISEAUX DE PROIE

à côté de celles-ci. Cependant, si je demande à papa un ou deux napoléons sur ce qu’il a gagné aujourd’hui, il me regardera des pieds à la tête, en me disant que j’ai une robe, un manteau et un chapeau, et me demandera ce qu’il peut me falloir de plus. Je vois ici des jeunes filles dont les pères sont si bons pour elles et si fiers d’elles ! Des filles laides, couvertes de soie, de dentelles, de rubans, de tout ce qui coûte très-cher. Imbéciles !… sottes !… qui me regardent comme si j’étais une bête sauvage, d’une espèce inconnue. »

Les salons étaient garnis d’immenses glaces dans lesquelles Diana Paget, triste, irritée, se voyait partout reflétée, dans son misérable accoutrement. Depuis peu de temps seulement, elle s’était aperçue qu’elle pouvait, comme une autre, avoir droit à des attentions. Son père, qui ne pouvait ou ne voulait lui donner une tenue convenable, affectait, lorsqu’il réprimandait sa fille, de le prendre de très-haut, sur un ton rigide, austère. Redoutant qu’un jour, elle ne s’enorgueillît de sa beauté, il avait pris soin de lui inspirer, dès son plus jeune âge, la pensée qu’elle était une véritable incarnation de tout ce qu’il y a d’inférieur, d’insignifiant, de gauche.


CHAPITRE II

LA PENTE RAPIDE

Parmi les nombreuses imprudences dont Horatio Paget, autrefois, cornette, dans un régiment de cavalerie innommé, et toujours capitaine dans le monde, s’était