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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/278

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bondes. Il ne s’arrête à rien, son imagination bouillante le pousse malgré lui et l’empêche de rien achever. Enfin, la quarantaine sonne ; son ardeur ambitieuse se calme peu à peu, ses yeux se dessillent.

Il récapitule : un drame, trois vaudevilles, un traité typographique à l’état d’embryon sont entassés pêle-mêle au milieu d’un monceau de paperasses, telles que nouvelles, poésies toutes plus fugitives les unes que les autres, quelques vers latins, des chansons, des acrostiches : c’est à peu près tout ce que peut compter tout correcteur de son âge ; mais, désormais fixé sur le prix de toutes ces productions, il s’en remet, avec J.-B. Rousseau, à la Lumière divine, du soin « d’illuminer ses actions » ; puis, comme il faut se consoler de tout :

« Felix qui potuit rerum cognoscere causas !


dit-il ; c’est encore être riche que de savoir que l’on est pauvre. »

« Dès lors tout change de face autour de lui : … il a su profiter des quelques traits de lumière qui ont jailli du foyer même de ses aberrations littéraires. Il a meublé son esprit d’une foule de connaissances acquises par les nombreuses recherches qu’il a faites dans ses rêves de gloire et de postérité ; rentré dans les limites de la saine raison, il en corrobore son éducation première pour en faire une utile application à son état, dont il sent aujourd’hui tout le mérite, et qu’il veut rehausser des talents réels qu’il possède dans la matière, talents qui ont su résister aux débordements de son imagination autrefois exaltée. »