Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/527

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çais, latin, grec, hébreu, etc., et ses capacités techniques ; son taux était peut-être aussi, après quelque temps de stage, calculé d’après la considération qu’avec plus ou moins de raison Plantin accordait à l’un (Raphelengien) ou à l’autre (Cornelis Kiliaan) de ses correcteurs.

À ces salaires de correcteurs on nous permettra de comparer rapidement quelques salaires de compagnons, soit imprimeurs, soit compositeurs[1] : « Les ouvriers ordinaires gagnaient chez Plantin une moyenne de 100 à 110 florins annuellement. Les bons ouvriers dépassaient parfois ce chiffre. Georges van Spangenberg, l’imprimeur, gagna en 1568, 122 florins 16 1 /2 sous ; Gilles de Villenfagne gagna, l’année suivante, 130 florins. Les compositeurs habiles touchaient un salaire plus élevé. Ainsi, en 1566, Corneille Tol gagna 150 florins ; Josse Neersman reçut, du 1er juillet 1569 au 1er juillet 1570, 165 florins. » Ces compagnons n’étaient point, semble-t-il, « aux despens ».

« Nous rencontrons deux ouvriers compositeurs demeurant pendant quelque temps dans l’imprimerie même. Ce sont Jacques Roche, qui, en 1563, outre le logis et la nourriture, reçoit 13 sous par semaine, et Josse Meersman, qui, le 1er octobre 1576, s’engage à servir Plantin moyennant 50 florins par an et ses despens. Le 27 novembre 1577, un nouveau contrat intervient avec ce dernier ouvrier, et Plantin s’engage à lui payer 100 florins par an, outre les dépenses. »

Les livres de comptes de l’imprimerie plantinienne se poursuivent jusqu’au xixe siècle. Ils sont incontestablement, pour l’étude des salaires dans notre profession, une mine d’une richesse exceptionnelle, où nous aurions été heureux de continuer à puiser si les circonstances nous l’avaient permis. — En France, nous ne possédons malheureusement rien de semblable ; nos grandes imprimeries du xvie siècle (les Estienne), du xviie (les Vitré[2] et Cramoisy[3]) et du xviiie (les Didot, les Le Breton) ont disparu sans laisser, croyons-nous, les docu-

  1. D’après M. Max Rooses, Christophe Plantin, imprimeur anversois, p. 243.
  2. Vitré imprima la fameuse Bible polyglotte de Lejai, dont l’impression se prolongea dix-sept années durant, de 1628 à 1645 ; le Corps de Droit de 1638, 2 vol. in-folio ; une Bible latine, I vol. in-folio. Comblé d’honneurs, Vitré fut l’imprimeur du roi pour les langues orientales, et l’imprimeur du clergé.
  3. Cramoisy fut le premier directeur de l’Imprimerie Royale installée au Louvre par Louis XIII.