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Page:Brossard - Correcteur typographe, 1924.djvu/568

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n’abusent pas de la susdicte descharge et qu’ils travailleront doresnavant avec plus de soing et de curiosité qu’ils n’ont faict depuis asses longtemps[1] ». — La journée commençait encore, comme en 1539, à cinq heures du matin et finissait à huit heures du soir. Il était interdit aux compagnons de quitter l’atelier, même à l’heure des repas ; cependant, depuis 1572 défense expresse était faite aux maîtres de nourrir leurs ouvriers. En fait, ces deux prescriptions furent la cause de nombreux désordres : on but et on mangea à l’atelier, même pendant les heures de travail, au détriment de l’hygiène — dont on se souciait peu sous l’ancien régime, — du travail et du bon ordre.

On ne saurait toutefois affirmer que, partout en France, la durée du travail était celle prescrite par les ordonnances royales. Nicolas Le Cœur, engagé à Troyes, le 8 janvier 1640, par Nicolas Oudot, travaille de cinq heures du matin à sept heures du soir.

Le 30 août 1777, l’arrêt du Conseil portant règlement pour les compagnons imprimeurs ordonna (art. 15) aux ouvriers en conscience — « les protes ou directeurs des imprimeries sont expressément assujettis aux mêmes devoirs » — d’être présents au travail de six heures du matin à huit heures du soir en été, et de sept heures du matin à neuf heures du soir en hiver[2]. Les journées fort longues continuèrent à être coupées par des repos employés à boire et à manger ; l’apprenti allait aux provisions[3].

Quelque dix années plus tard, avec la Révolution qui vient d’éclater, les usages corporatifs vont disparaître et nombre de coutumes se modifier. « La durée du travail est réduite : dans la plupart des ateliers elle est fixée entre huit heures du matin et huit heures du soir. Au milieu du jour, deux heures sont accordées à l’ouvrier », qui désormais pourra prendre ses repas au dehors.

Sous l’ancien régime, la journée de travail était longue, mais le chômage était fréquent. Les doléances des compagnons sont incessantes sur ce sujet : ils donnaient comme raisons de cet état de choses le trop

  1. Augmentée en 1654, cette quantité de travail fut rétablie par un arrêt du Parlement du 12 juillet 1659.
  2. Voir art. 15, p. 538.
  3. D’après Restif de la Bretonne et Dufrène dans Misère des Apprentis.