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Page:Burnouf - Introduction à l’histoire du bouddhisme indien.djvu/573

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DU BUDDHISME INDIEN.

No II. — DE L’EXPRESSION SAHALÔKADHÂTU.
(second mémoire, section ii, page 82.)

L’expression dont se sert ici le texte est Sahalôkadhâtu : c’est un terme familier aux Buddhistes de toutes les écoles pour désigner l’univers habité par les hommes. Le dernier mot dhâtu, qui veut dire élément, n’y est guère qu’explétif, et il n’ajoute rien à la signification du mot lôka. C’est ce que prouve le passage suivant d’un commentaire sur le Djina alam̃kâra, poëme pâli en l’honneur du Djina (ou du Buddha) : tîsûpi lokadhâtusu djetthasetthattam patto, « ayant obtenu l’excellence et la supériorité dans les trois mondes mêmes[1]. » Il faut donc admettre que Sahalôkadhâtu ne dit pas plus que Sahalôka.

Il a déjà été proposé plusieurs explications de ce terme difficile. Quand il parut pour la première fois dans l’Histoire du Kachemire, M. Wilson le traduisant au commencement du deuxième vers de la stance 172, asmin sahalôkadhâtâu, en donna cette explication qui est au moins obscure : « dans cette essence du monde[2]. » Plus tard, parlant de l’univers fabuleux de Çukhavatî, cette terre fortunée que les Buddhistes du Nord imaginent être située à l’occident[3], il distingua lôkadhâtu, comme le titre spécial d’une division de l’univers ; et rencontrant dans les petits traités envoyés à Calcutta par M. Hodgson l’expression Sahalôkadhâtu, il la rendit ainsi : « dans le Lôkadhâtu nommé « Saha. » À cette traduction M. Wilson ajouta que la division nommée Saha désignait apparemment une partie de l’Himalaya et embrassait le Kachemire ; et tout en continuant de déclarer admissible le sens de l’essence du monde qu’il avait donné précédemment, il y renonça cependant, parce que ce sens n’était pas technique en cet endroit[4]. Enfin, rendant compte dans le Journal Asiatique du Bengale des premiers travaux de Csoma de Cörös sur le Kah-gyur, il définit d’une manière plus générale le Sahalôkadhâtu, « la région ou le monde « de Çâkya, c’est-à-dire le monde des mortels qui est gouverné par Brahmâ[5]. »

Mon savant ami, M. Troyer, en publiant le texte et la traduction de l’Histoire du Kachemire par Kalhana, avait sous les yeux l’édition de Calcutta et le manus-

  1. Djina alam̃kâra, f. 5 b de mon manuscrit.
  2. Asiat. Researches, t. XV, p. 111.
  3. Notice of three tracts received from Nepal, dans Asiat. Res., t. XVI, p. 471.
  4. Asiat. Res., t. XVI, p. 473 et 475.
  5. Journ. of the Asiat. Society of Bengal, t. I, p. 384.