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Page:Burnouf - Le Bhâgavata Purâna, tome 2.djvu/140

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toutes les facultés qui en dépendent, il n’aperçoit plus, en dehors ni au dedans de lui, la distinction qu’il voyait auparavant entre le monde et l’Esprit, parce qu’elle a disparu, comme disparait au réveil le rôle qu’un songe nous faisait jouer.

28. C’est dans son cœur, au sein de cet attribut sans réalité, que l’homme voit [une distinction entre] l’Esprit et l’objet sensible, et qu’il saisit le principe [de la personnalité] qui est différent de l’un et de l’autre ; sans le cœur il ne verrait pas cette distinction.

29. En général il faut une cause accidentelle, comme la présence [d’un miroir ou] de l’eau, pour que l’homme se distingue lui-même de son image ; cela ne peut avoir lieu autrement.

30. Chez les hommes qui ne songent qu’aux objets, le cœur distrait par les sens qu’entraînent les choses extérieures, enlève à l’intelligence la faculté qu’elle a de connaître, comme le gazon pompe l’eau de l’étang [au bord duquel il croît].

31. La perte de la mémoire suit celle de l’intelligence, et la perte de la science, celle de la mémoire ; quant à la perte de la science, les sages l’ont dit, c’est l’anéantissement de l’âme par elle-même.

32. Non, il n’y a pas au monde pour l’homme d’anéantissement plus réel que cet oubli de soi-même qui porte l’âme à trouver hors d’elle quelque chose de plus précieux qu’elle-même.

33. La préoccupation passionnée que produit le mouvement qui entraîne les sens vers les objets, est l’anéantissement complet de l’homme ; il perd ainsi la science divine et humaine qui seule assure sa supériorité.

34. Que celui qui veut traverser les épaisses ténèbres [du monde] ne s’attache jamais à ce qui peut détruire pour toujours le devoir, la fortune, le plaisir et le salut.

35. Parmi ces quatre objets mêmes, le salut est le seul que son caractère de durée rende digne d’être recherché ; car les trois autres biens que l’homme désire sont toujours accompagnés de la crainte qu’inspire le Temps.

36. Les êtres, tant supérieurs qu’inférieurs, viennent tous de la transformation successive des qualités ; le bonheur durable n’existe